Plutarque Vies des hommes illustres
Pendant le trouble que cette entreprise excita dans la ville, Mégaclès s’enfuit précipitamment, avec les autres Alcméonides. Pour Solon, malgré son extrême vieillesse, malgré cet universel abandon, il se rendit sur la place ; et là, il reprocha aux Athéniens leur imprudence et leur lâcheté, et il les exhorta, il les pressa vivement de ne pas trahir la cause de la liberté. C’est à ce moment qu’il dit ce mot si célèbre : « C’eut été chose facile naguère de réprimer la tyrannie naissante ; maintenant, qu’elle est établie et qu’elle a poussé, il sera plus grand et plus glorieux de la détruire. » Mais, comme il eut vu que tous avaient peur, et que personne ne l’écoutait, il rentra chez lui, prit ses armes, et les posa dans la rue devant sa porte, en disant ; « J’ai défendu, autant qu’il était en mon pouvoir, la patrie et les lois ; » et depuis il vécut en repos. Ses amis lui conseillaient de fuir ; mais il n’écouta pas leurs avis, et il se mit à faire des vers, dans lesquels il reprochait aux Athéniens toutes leurs fautes :
Si vous avez enduré ces maux par votre lâcheté,
N’accusez pas les dieux de votre malheur.
Ces hommes, c’est vous qui les ayez faits si grands, en leur donnant ces appuis ;
Et voilà pourquoi vous êtes dans ce honteux esclavage.
Solon avait entrepris de mettre en vers cette grande histoire ou cette fable de l’Atlantide, que lui avaient contée les sages de Saïs, et qui intéressait les Athéniens. Mais il y renonça bientôt, non point, comme le prétend Platon, qu’il eût autre chose à faire, mais bien à cause de sa vieillesse, et effrayé de la longueur du travail ; car il vivait alors dans un grand loisir, comme il le fait entendre lui-même :
Je vieillis en apprenant toujours davantage ;
et ailleurs :
Ce que j’aime aujourd’hui, ce sont les dons de Cypris, de Bacchus
Et des Muses : c’est là ce qui fait le bonheur des hommes.
PUBLICOLA. (Florissait vers la fin du VIe siècle avant J.-C.)
Voilà quel fut Solon. Nous l’allons mettre en parallèle avec Publicola, celui pour lequel le peuple romain imagina ce surnom d’honneur[1] et qui s’appelait auparavant Publius Valérius. On croit qu’il descendait de ce Valérius[2] qui fut, dans les temps antiques, le principal instrument de la réconciliation des Romains avec les Sabins, et de leur réunion en un seul peuple, puisque ce fut lui surtout qui détermina les deux rois à une conférence, et qui leur fit conclure la paix. Telle était, suivant la tradition, la famille de Valérius. Or, à l’époque où Rome était encore gouvernée par des rois, il s’y distinguait déjà par son éloquence et par ses richesses. Il usait de l’une droitement et franchement, pour la défense de la justice, et il employait l’autre à secourir libéralement et avec humanité ceux qui étaient dans le besoin : aussi voyait-on, dès ce temps-là, que, si le gouvernement devenait jamais démocratique, Valérius y tiendrait le premier rang.
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- Loose-Sutures
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- 7 septembre 2024 à 04:18:44
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