Les confessions de Mattéo 18 ans, tueur à gage à Marseille
SuppriméDans l'histoire du narcobanditisme marseillais, et sa compréhension, il y aura un avant et un après 3 avril 2023. La nuit précédente, des fusillades ont frappé en plusieurs endroits de la ville : au Castellas (15e), aux Aygalades, où les tirs se sont enchaîné sur plus de 500 m, causant deux morts et neuf blessés. Moins d'une heure plus tard, c'est devant un snack de la Joliette (2e), au coeur du quartier d'affaires que trois autres victimes ont été dénombrées. Kaïs, 16 ans, est mort sur place. Djibril, 15 ans, a succombé depuis à ses blessures et un troisième adolescent de 14 ans a été plus légèrement touché.
Une nuit de terreur considérée alors, par la préfète de police, Frédérique Camilleri, comme le point culminant "d'une dynamique de vendetta entre deux clans lourdement armés". La "DZ Mafia" contre le clan dit de "Yoda" : deux gangs implantés à la cité de la Paternelle, en "guerre" pour le contrôle des points de deal du quartier, parmi les plus rentables de la ville.
L'escalade débute en février. Les relations déjà précaires entre les deux organisations auraient dégénéré après une embrouille de discothèque en Thaïlande - un glaçon jeté sur un boss de la "DZ Mafia" par un caïd de l'équipe d'en face... Au fil des semaines, les fusillades se propagent aux Micocouliers, à la Cabucelle et aux autres cités affiliées à l'un ou l'autre des camps.
Mais le plus déroutant reste à venir. La nuit du 3 avril, une Peugeot 308 repérée par des témoins du double homicide de la Joliette est localisée par les policiers de la brigade de recherche et d'intervention (BRI). Elle est garée près d'un pavillon de Gardanne, où les agents déboulent au petit matin. Matteo F., 18 ans, s'y trouve avec sa compagne et deux mineurs. Il est cueilli à froid. Dans le véhicule, un pistolet et ses munitions de 9 mm sont retrouvés. Les analyses confirmeront plus tard que c'est bien l'arme qui a servi à tuer à la Joliette.
Matteo râle. "Vous avez de la chance que je n'avais pas d'arme sur moi. Autrement, je serais mort les armes à la main", aurait-il provoqué la PJ. "Il semble être fasciné par le crime organisé comme d'autres le sont par le djihadisme, c'est un radicalisé du crime", résume une source policière citée par nos confrères du Parisien.
Dans les couloirs de l'hôtel de police de l'Évêché et du palais de justice où il est trimballé, l'allure de Matteo chamboule jusqu'aux fonctionnaires les plus aguerris. "Il pèse 40 kilos tout mouillé, il a les cheveux longs jusqu'aux fesses. On aurait dit Jésus", se pince un témoin. "C'est un vrai serial killer. En garde à vue, il a commencé à tout balancer froidement et sans affect. On n'arrivait pas à suivre", confie un autre.
Dans un univers où règne volontiers la loi du silence, son récit offert avec force de détails, dépasse l'entendement. Originaire du Pays d'Aix, ce garçon au visage marqué par l'acné a grandi dans une famille de la classe moyenne. Son père est chef d'entreprise. Mais quand la plupart des jeunes de sa génération ne voient que par le foot ou la musique, Matteo, lui, est "accroc au narcobanditisme".
Il a fait ses armes entre Gardanne et Salon-de-Provence, où il s'est fait connaître d'abord auprès des réseaux locaux, puis de la justice. Son jeune âge lui a valu un placement en centre éducatif fermé pour mineurs. Mais dès sa sortie, il a pris la direction de la région parisienne et s'est acoquiné avec des équipes franciliennes. Avant de plonger à nouveau pour trafic de stups. Cette fois, Matteo a été incarcéré. Selon nos informations, c'est à la prison de Fresnes qu'il aurait noué de nouveaux liens avec des caïds marseillais, avant de retrouver la liberté, en décembre 2022. Et de passer, presque aussitôt à la vitesse supérieure...
Il aurait proposé ses services via l'application Snapchat à des trafiquants. Les recrues de la sorte sont d'ordinaire "consommées" en bas des tours comme guetteurs ou vendeurs. Mais Matteo F. a d'autres ambitions. Il rêve d'un autre rôle. Il se voit tueur à gages. "Pour un réseau, ce genre de recrues est du pain béni. Il est hors des radars policiers. Et ils peuvent se servir de lui et s'en débarrasser comme ils veulent", analyse un enquêteur.
Selon nos informations, confirmant celles du Parisien, ses employeurs lui auraient fourni armes et voitures volées, avec interdiction de paraître à Marseille en dehors de ses heures de travail. Sur commande, ils l'utilisaient en mode tueur Uber : "Il faut imaginer la scène. Il marche dans la rue. Il reçoit un message des commanditaires sur son portable, qui lui indique l'endroit où est garée une voiture. Il s'y rend. À l'intérieur, il y a une arme prête à l'emploi. On lui indique ensuite la cible. Il accomplit sa mission. Parfois en tirant dans le dos. Puis il rentre tranquillement chez lui, en surveillant le buzz. Et en attendant sa prochaine mission". Ivre de sa propre violence, Matteo F. s'est filmé dans une des voitures, visage encagoulé, évoquant les "contrats" qu'il "va enchaîner". "Je suis en train de m'envoyer sur un contrat je suis en train de rigoler là" s'observe-t-il, hilare.
De source judiciaire, on raconte que ses employeurs lui avaient demandé de se mettre en scène après les contrats pour leur prouver sa mission accomplie. "Mais c'était aussi pour le tenir. Ils pouvaient ensuite le menacer de balancer les vidéos à la police ou au clan adverse s'il n'obéissait pas à un ordre ou se manquait", croit savoir un proche du dossier. Une autre précise : "Il explique qu'il ne savait pas vraiment pour qui il travaillait, mais son mentor est proche de la DZ Mafia, et il était envoyé sur des objectifs du clan adverse."
"Des équipes feu, des véhicules et des armes en attente, il y en a toujours eu, relève un magistrat, ce qui frappe, c'est la rapidité de réaction. C'est aussi lié à la technologie, mais le 'go' est donné dans des délais très courts." Moins d'une heure sépare les fusillades du 2 au 3 avril.
À ce stade des investigations, Matteo F. est mis en examen pour ce double assassinat, des adolescents, prétendument membres du clan rival de ses employeurs. Il aurait aussi endossé l'élimination d'un Parisien de 20 ans, retrouvé deux jours après sa mort, le 29 mars, par des CRS sur un terrain vague de la Paternelle (14e).
Mais les enquêteurs soupçonnent aussi le "sicario" d'avoir tué un homme de 21 ans à la Maurelette (14e), le 17 mars. Filmée par une caméra de vidéosurveillance, la scène glace le sang : on voit le tueur courir derrière sa cible, puis vider sa kalachnikov à quelques mètres de la victime semblant implorer d'être épargnée. Ce soir-là, un homme de 63 ans sera aussi grièvement blessé par balle en sortant de la mosquée voisine, visé par méprise. De source judiciaire, on confie même, estomaqué, que Matteo F. "pourrait être impliqué dans 6 ou 7 règlements de comptes, voire beaucoup plus... Nous sommes en train de vérifier toutes ses déclarations".
"Le contrat était à 20 000 euros. Il montait selon les retombées médiatiques"
La rémunération promise pour ces assassinats qui ont dévasté des familles entières ? "La part fixe était de 20 000 euros. Mais le tarif n'était pas fixe. Il pouvait monter à 50 000 € selon les retombées médiatiques et le nombre de vues que faisaient ses vidéos", révèle une source policière. Le jeune homme se chargeait lui-même de la "revue de presse" après ses actions, récupérant les vidéos postées par des témoins sur les réseaux sociaux. "C'est l'effet recherché : terroriser. Tout le monde peut être tué, n'importe quand et même si tu es un petit. Plus il y a de buzz, plus la paye est élevée", confirme ce fonctionnaire.
Dans un soupir, il lâche : "L'argent ne semble pas être le moteur. Il a un QI assez élevé. Il est fier de lui. Fier de ce qu'il a fait. Fier d'avoir été embauché par ces gens et d'être considéré comme un des meilleurs tueurs". Et d'enrager : "D'autres frappent au portillon. On en vient à penser que la vie n'a plus de valeur pour eux. Ni celle de leur pote qu'ils ont vu mourir. Ni la leur". Nos interlocuteurs s'accordent sur un constat : "Quand un gamin de 18 ans a un ego aussi surdimensionné pour avoir tué de sang-froid, c'est qu'on a tous perdu la guerre, policier, magistrats, acteurs sociaux. Notre société a fabriqué des monstres. Maintenant, il faut collectivement s'interroger sur le comment et tenter de sauver la génération suivante".
Le 24 mai 2023 à 11:33:52 :
eh ben
totalement zinzin celui la
Le 24 mai 2023 à 11:36:45 :
Source ?
la provence
[11:37:08] <Kheyduhelm>
Le 24 mai 2023 à 11:36:45 :
Source ?
Merci.
"Notre société a fabriqué des monstres. Maintenant, il faut collectivement s'interroger sur le comment et tenter de sauver la génération suivante."
Tout est dit
Putain c'est lunaire quand même
Ces histoires de cas sociaux bordel
Données du topic
- Auteur
- kheyduhelm
- Date de création
- 24 mai 2023 à 11:20:10
- Date de suppression
- 24 mai 2023 à 13:59:00
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