Le premier courrier que nous avons pu consulter, daté de 2016, est adressé à Marc Wolff et signé de la main du directeur de l’établissement. « En juillet 2013, Madame P., proviseur, à l’occasion de ma prise de fonction, m’informait d’un rapport qui vous avait été adressé et qui faisait état de différents dysfonctionnements et manquements à vos obligations d’enseignant », débute la lettre, avant d’égrainer des critiques portant sur « la clarté des cours », « les remarques faites aux élèves » et « un langage trop grossier ».
Élève « frappé à l’arrière de la tête »
Le courrier mentionne aussi l’existence d’un « rapport d’incident transmis à l’inspection académique » en 2015 après que l’enseignant a « frappé » un élève de seconde « à l’arrière de la tête » alors que ce dernier chahutait dans un couloir. Sollicité par Mediapart, le candidat du Rassemblement national reconnaît « un geste parfaitement déplacé ».
L’élève en question, que nous avons joint, décrit « un coup violent » qui avait fait « voler » ses lunettes. « Quand je me suis retourné pour voir qui m’avait frappé, j’ai été surpris de voir que c’était mon prof, je pensais que c’était un élève », dit-il.
Trois autres anciens élèves du lycée Robert-Schuman affirment eux aussi, entre 2014 et 2016, avoir été victimes ou témoins de violences physiques infligées par l’enseignant (une gifle sur la joue, de « nombreuses » claques derrière la tête, un bras tordu dans le dos, une chaise retirée pour faire tomber un lycéen au sol). Interrogé sur ces témoignages, l’enseignant a refusé de répondre, estimant que les faits étaient trop anciens, qu’on « exagérait » et qu’on « se transformait en procureur ».
La lettre de 2016 fait aussi état de « propos déplacés, voire humiliants, incompatibles avec la fonction d’éducateur ». « Je vous demande donc une dernière fois de faire preuve de retenue et de mesure dans les relations que vous avez avec les élèves », intimait le chef d’établissement à l’enseignant.
Propos dénigrants et sexistes
Ce sera loin d’être le dernier rappel à l’ordre. Un an plus tard, le nouveau proviseur doit à son tour se fendre d’un courrier. « Il m’a été rapporté que vous seriez coutumier de termes blessants, négatifs, voire humiliants », souligne le fonctionnaire, qui recense des exemples particulièrement intéressants.
À l’instar de cette phrase lancée à une lycéenne : « Ce ne serait certainement pas toi qui serais victime de harcèlement sexuel. » « Propos inadmissible que je qualifierais pour le moins de dégradant et qui “autoriserait” le harcèlement sexuel », relève le supérieur de Marc Wolff. Autre exemple cité : « Pour arrêter ton hoquet, tu n’as qu’à regarder Untel », sous-entendu « il est moche, il fait peur ». « Mes prédécesseurs vous ont déjà alerté au sujet d’échanges que vous pouvez avoir avec vos élèves », insiste le proviseur qui appelle encore une fois à « plus de mesure, de discernement, de professionnalisme » et une « attitude respectueuse ».
Marc Wolff dit aujourd’hui ne pas se souvenir avoir tenu ces propos et plaide « l’humour ». Une élève, dont nous avons recueilli le témoignage, dit aussi avoir été assimilée à une « chimpanzé » ou encore à une « autiste ». Là encore, Marc Wolff a refusé de commenter.
Ce ne serait certainement pas toi qui serais victime de harcèlement sexuel.
Propos de Marc Wolff à l’égard d’une lycéenne
Un an plus tard, en 2019, un nouveau rappel à l’ordre tombe encore. Toujours les mêmes reproches sur des propos « inadmissibles », parmi lesquels on peut notamment retenir cette phrase lancée à un élève : « Tu n’as qu’à aller au 3e étage et sauter. » « Ce n’est pas tout à fait cette formulation », nous a indiqué le professeur de physique-chimie, tout en refusant de préciser ce qu’il avait voulu dire.
« Ces agissements ne sont plus tolérables et je me vois dans l’obligation d’en référer à la division des personnels ainsi qu’au corps d’inspection de physique-chimie », concluait le courrier de 2019.
« Sous surveillance »
Selon nos informations, en 2020-2021, durant la période covid, des membres de l’équipe d’encadrement et des CPE (conseillers principaux d’éducation) du lycée devaient assister à tour de rôle aux cours que l’enseignant donnait en visioconférence pour « surveiller » et « vérifier qu’il n’y ait pas de dérapages ».
Rappelé maintes fois à l’ordre pour des faits de violences verbales et physiques, Marc Wolff a-t-il finalement été sanctionné ? Le rectorat de Strasbourg a refusé de nous répondre. Lui affirme n’avoir subi aucune sanction. « Nous avons aujourd’hui, au XXIe siècle, des élèves qui sont beaucoup moins travailleurs, beaucoup plus susceptibles que par le passé, et qui estiment que le professeur est finalement là pour travailler pour eux, à leur place. Et effectivement, ce n’est pas ma vision de la fonction de professeur », explique-t-il pour justifier son « style » d’enseignement.
L’enseignant indique également avoir déposé plainte en diffamation jeudi, après que des anciens élèves ont témoigné sur les réseaux sociaux pour dénoncer des faits de violences physiques, des propos racistes mais aussi des agressions sexuelles.
Comme de très nombreux candidats RN en lice au second tour, Marc Wolff a aussi été épinglé par Rue89 Strasbourg pour des posts sur les réseaux sociaux pétris de clichés racistes. En juin 2023, au-dessus d’une photo ancienne montrant une enseignante flageller un enfant, il écrivait ceci : « Intrusion de l’islamisme dans les écoles de Nice, la France de 2023 est devenue bien lâche, alors que le problème peut très vite être résolu. »
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