L'enfer de la WW1 : Lettres de soldats Français
Salut l'élite
Hier c'était l'anniversaire de l'armistice, et j'ai passé une bonne partie de la journée à lire des lettres et des témoignages de soldats qui ont vécu l'horreur de ces affrontements. Beaucoup m'ont énormément marqués, je vais donc en poster quelques uns ici, à mes yeux il est important de ne pas les oublier.
Attention, certains écrits peuvent choquer ou émouvoir.
Journée du 21 juin 1916, lutte pour l'ouvrage de Thiaumont. Témoignage d'Emile HUET, mitrailleur au 54e R.I. :
" Le 21 juin, en montant à l'attaque, j'ai vu des choses horribles ; des hommes d'un régiment qui était sur notre gauche, au nombre d'une compagnie environ, se trouvaient dans un bout de tranchée qui avait été épargné. Au moment où nous passions, le bombardement était épouvantable. Le tir de barrage est tombé juste sur cette tranchée et a recouvert tous les hommes qui étaient dedans. On pouvait voir la terre se soulever par l'effort de tous ces malheureux. J'ai toujours cette vision devant les yeux. "
Journée du 24 février 1916, attaque allemande sur les deux rives. Témoignage de D. SCHLATTER, soldat au 60e R.I. :
"Le 24 février, les blessés commencent à affluer au poste de secours, en arrière de la cote 344. Quel moral chez ces combattants ! Un sergent, pendant qu'on lui coupait la cuisse, broyée par un éclat, chantait la Marseillaise !… "
Mois de mars 1916, attaque allemande sur les deux rives. Témoignage de Julien SANDRIN, sergent au 11e Génie :
" Dans les attaques de Vaux, en mars, j'ai vu un lieutenant de chasseurs qui, le bras gauche broyé par un éclat d'obus, continuait à se battre avec sa main valide. "
" Un mitrailleur a le ventre ouvert; il accourt ici avec ses pauvres mains crispées sur ses intestins qui s'échappent. L'autre m'arrive, la tête bandée de son pansement individuel, soutenu par un camarade. Je le fais asseoir devant moi, sur la petite caisse, mais il a l'air quasi endormi et ne s'aide pas du tout, laissant sa tête brimbaler de droite et de gauche. Je suis pressé et, sentant les autres qui attendent, je lui demande de se mieux prêter au pansement. Mais lui ne cesse de répéter inlassablement : "Oh ! laissez-moi dormir, laissez-moi dormir".
J'enlève la bande qui lui entoure la tête et alors, la chose horrible m'apparaît: toute la moitié de son cerveau, son hémisphère droit tout entier glisse en dehors de son crâne béant et j'éprouve cette sensation terrible de recevoir dans ma main gauche toute la matière cérébrale de ce malheureux qui, la boite crânienne défoncée et vidée en partie de son contenu, continue de me répéter son leitmotiv : "Laissez-moi dormir". Alors je lui dis: "Oui, mon vieux, va, on va te laisser dormir".
Et je vide ma main de son contenu que je remets à sa place, maintenant le tout avec des compresses et une bande... avec quelles précautions et quelle angoisse !... "Va dormir, va, mon vieux". Soutenu sous chaque bras, ce mort vivant fait quelques pas, s'étend dans un coin. Une piqûre de morphine, une couverture et le sommeil, pour toujours. "
Témoignage de R.P. CADET, soldat au 51e D.I. :
" Près de moi, un sergent souffre d'une façon atroce… il a été blessé à la tête et il croit avoir les pieds gelés ; la douleur le fait pleurer. Plus loin, des larmes encore ; un soldat allemand, en délire, appelle sa mère ; il crie, il crie fort, des sanglots se mêlent à ses cris. Il ne se souvient plus que de sa mère ; tout le reste du monde n'existe plus pour lui. "
23 juin 1916. Témoignage du canonnier servant FOURMOND, 115e batterie, 44e R.A.C. :
" Je me dois de signaler l'héroïsme d'un soldat du 359e R.I. qui, blessé lui-même, transporta sur son dos, des hauteur de Thiaumont à la route de Verdun à Bras, c'est-à-dire sur un parcours de plusieurs kilomètres, un camarade affreusement mutilé, en traversant des tirs de barrage de pièces lourdes sans jamais s'arrêter. Ils perdaient tellement de sang, l'un et l'autre, qu'on les eut dits vêtus de capotes écarlates ; ils passèrent près de nous et le porteur avait une expression empreinte d'une énergie tellement farouche que son visage en était effrayant. "
Témoignage de Ch. CAUTAIN, soldat au 95e R.I. :
" Brochard court dans la tranchée, soutenant de sa main valide son bras à moitié déchiqueté. Le sang coule comme l'eau d'un robinet. Il va, sans un mot, sans une plainte. Aura-t-il la force d'aller au poste de secours ? où est-il d'ailleurs, ce poste de secours ? Personne ne le sait. "
Et dire que si il y avait une nouvelle guerre mondiale il y aurait même pas le quart de la population "française"
Journée du 5 juin 1916, bataille du fort de Vaux. Témoignage de Jacques FERRANDON, soldat au 321e R.I. :
" Le 5 juin, ma compagnie tenait, près du fort de Vaux, les abords de l'entrée, tournée face à l'ennemi, qui était plus particulièrement visée et constamment bombardée, surtout par des gros calibres. Quatre hommes de ma section, dont le sergent Lebas, sont allés se mettre à l'abri à l'entrée. Un obus ayant éclaté à leurs pieds les a foudroyés et a fait de leurs quatre corps mélangés un amas de chair informe et méconnaissable, à tel point que le capitaine Baumé, commandant la compagnie, pleurait comme un enfant devant un pareil massacre.
J'ai pu voir, à l'entrée de la redoute où étaient établis le P.C. de la compagnie et le poste de secours, les morts entassés les uns sur les autres, sur environ 1 mètre de hauteur et je ne sais combien de mètres de long.
Le 6 juin, à 2 heures du matin, nous montions à l'attaque du fort de Vaux. Nous avançâmes jusqu'au moment où, ayant épuisé toutes nos munitions en grenades et, postés dans un entonnoir, nous tirions presque à bout portant sur l'ennemi, bien visible sous les fusées éclairantes.
Trop occupé à me battre, je n'entendis pas l'ordre de repli ; quand je m'aperçus que j'étais seul, je m'aplatis dans un trou. Ayant attaché mes armes et équipements à mes jambes, je pris en rampant le chemin du retour. Combien de temps m'a-t-il fallu, je ne puis le dire, mais ce que je vis fut affreux : partout des cadavres français et allemands, pêle-mêle. Je ne me détournais de l'un que pour passer sur un autre ; pas un trou qui ne contînt plusieurs morts ou mourants ; c'était épouvantable ; il faut avoir parcouru les abords du fort de Vaux pour se rendre compte d'un tel massacre. "
Le 12 novembre 2019 à 10:49:12 Amnesy_ a écrit :
C'est éprouvant à lire
Imagine à vivre
Données du topic
- Auteur
- Anatolydyatlov
- Date de création
- 12 novembre 2019 à 10:40:04
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