La chasse aux cachalots au XIXe siècle
Alors que les hommes chassent les baleines depuis le X-XIe siècle, le cachalot n'était pas du tout une cible privilégiée, car il apparaissait comme plus menaçant que les baleines franches de l'atlantique Nord, au caractère docile. D'une manière générale, en Europe, la chasse aux grands cétacés consistent à transformer la couche de graisse (appelée lard ou "pannicule adipeux") sous la peau des baleines en huile en fondant le lard. La principale fonction de cette huile est l'éclairage.
Pour la chasse spécifiquement aux cachalots, avant le XVIIIe siècle, il y avait déjà quelques captures européennes (notamment par des baleiniers basques). Cette chasse se développera au XVIIIe et au XIXe siècle. Elle reprendra de plus belle après la seconde guerre mondiale, en devenant un véritable carnage pour l'espèce.
Au XVIIe siècle, les européens (Hollandais, Anglais, Français et Allemands des villes hanséatique) se concentrent essentiellement au nord de l'Europe (Spitzberg, Islande, Norvège, Mer du Nord) pour chasser la baleine du Groenland dès le début du XVIIe siècle, car elle est plus grasse que la baleine franche, alors que les Américains commencent à chasser les baleines franches de l'atlantique nord dès les années 1650 environ. Les américains vont directement passer de la chasse à la baleine franche au cachalot, sans que la baleine du Groenland soit la cible privilégiée d'une époque.
La baleine franche de l'atlantique Nord, première espèce de baleine a être chassée, dès le Moyen-Âge.
La baleine du Groenland, chassée grandement à partir du début du XVIIe siècle, quand le Spitzberg est découvert, au nord de la Norvège. Plus grasse que la baleine franche. Certaines captures ont néanmoins eu lieu par des Basques en Amérique du Nord à partir de stations baleinières côtières dès le début du XVIe siècle.
Carte du Spitzberg, au nord de la Norvège.
Le premier grand port baleinier américain est la petite île de Nantucket, mais on chassait déjà la baleine au Cap cod avant. Les premières chasses dans la seconde moitié du XVIIe consistaient à observer l'horizon depuis une tour sur la terre ferme pour signaler la présence d'une baleine. Les chasseurs mettaient à l'eau leurs bateaux pour poursuivre et tuer avec un harpon et une lance la baleine, et ainsi la ramener sur le rivage pour la dépecer afin de fondre sa graisse pour obtenir de l'huile. Les fanons (des extensions en kératine de la mâchoire supérieur qui remplacent les dents) étaient aussi prélevés. Ces fanons ne se retrouvent pas sur le cachalot, qui lui a véritablement des dents, ce qui fait que le cachalot n'est pas une baleine.
Cette méthode à partir du rivage était déjà pratiquée par les baleiniers basques au Xe siècle.
Carte du Massachusetts, avec l'île de Nantucket en bas à droite. On voit New Bedford sur le continent, le second grand port baleinier américain. Son influence dépassera totalement Nantucket à partir des années 1840. New Bedford dispose d'un port plus profond qui permet d'accueillir de plus grands baleiniers.
Cependant, très rapidement, il a fallut s'écarter des côtes pour rendre la chasse plus rentable et prolifique avec un véritable bateau baleinier, équipé de "baleinières" qui sont des espèces de barques à partir desquelles les baleines sont chassées et tuées.
Exemple typique de baleinier américain, avec ses baleinières.
Baleinier "Charles Morgan" construit en 1841, retraité depuis 1921, et exceptionnellement conservé depuis. D'une taille moyenne d'un peu plus de 300 tonneaux. Le record de taille d'un baleinier est le Sea, de 807 tonneaux.
D'après la légende, le premier cachalot capturé par un américain date de 1712 par un certain Christopher Hussey. Cependant, il faudra encore attendre 30 ans pour que l'intérêt commercial du spermaceti soit connu. Le spermaceti est un liquide blanchâtre situé au-dessus de la mâchoire de l'animal. Comme les baleines, le lard du cachalot (la couche de graisse en dessous de la peau) donnait une huile. Ces deux produits sont jugés meilleurs que l'huile des autres baleines, notamment pour l'éclairage. En effet, l'huile de baleine en elle-même est indolore et ne produit pas de fumée. Cependant, il semblerait que l'huile de cachalot a moins tendance a geler que l'huile des autres baleines. La superiorité de l'huile de cachalot n'est pas admise par tous les baleiniers, par exemple les français. Il semblerait nonobstant que l'identité de ce chasseur (Christopher Hussey) ou la date soit inexacte et relève de la légende.
Anatomie d' une tête de cachalot, on y voit "l'organe du spermaceti".
Comme le cachalot est une espèce très différente de la baleine franche de l'atlantique du nord, la chasse va en être affectée. En effet, quand on chasse la baleine franche, on attaque en priorité les femelles adultes avec un baleineau, car 1) elles sont plus grandes que les mâles, les femelles peuvent atteindre 20 mètres, et 2) une baleine n'abandonne jamais son baleineau, la capture du baleineau amène donc la capture de la femelle adulte.
Pour le cachalot, c'est très différent, car le dimorphisme sexuel est en faveur d'une chasse des mâles adultes. En effet, les femelles ne dépassent pas 12-14 mètres, quand les males peuvent atteindre 22-21 mètres. Ce seront donc les grands mâles qui seront chassés lors de la chasse aux cachalots, sachant que les grands mâles sont généralement en solitaire, en opposition aux femelles qui vivent avec d'autres femelles et des juvéniles.
Le XVIIIe siècle va donc voir le développement de la chasse aux cachalots par les américains dans l'Atlantique nord. Vers la fin du siècle, les baleiniers vont jusqu'à l'Atlantique Sud (Malouines) et les Anglais se mettent aussi en chasse du cachalot en 1785, avec une flotte baleinière développée et expérimentée. La France n'aura pas le temps de suivre, car la flotte baleinière (40 navires) sera détruite pendant la Révolution et l'empire. De manière générale, la baleinerie française ne s'intéresse pas beaucoup aux cachalots, même au XIXe siècle où la cible favorite des français est la baleine franche australe, notamment près de l'Amérique du Sud.
Les Anglais seront d'ailleurs les premières à étendre les zones de chasse dans le Pacifique. Le baleinier Amelia franchit le premier le Cap Horn en 1788.
Le caractère pélagique (il vit en haute mer) et cosmopolite (surtout des mâles qui fréquentent les eaux froides) du Cachalot va radicalement changer transformer les activités des baleiniers. En effet, le caractère pélagique du Cachalot empêche de le ramener sur la terre ferme pour le dépecer, il est donc nécessaire de le dépecer en mer et de traiter et stocker l'huile et le spermaceti dans la cale. De même, la pêche devient mondiale et les voyages deviennent de plus en plus longs, de quelques mois à 5 ans.
Avant d'aborder le traitement de la carcasse, il faut évoquer la chasse en elle-même.
Le grand mât d'un baleinier fait généralement une trentaine de mètres, et des hommes se relaient toutes les 2 ou 4 heures pour observer l'horizon. Dès qu'il répère une baleine, ils doivent la signaler. Le souffle de l'animal permet d'identifier s'il s'agit d'une baleine ou d'un cachalot (souffle particulièrement oblique). Cependant, ce n'est pas le navire baleinier qui chasse en lui-même. Les baleinières (strict minimum 2, généralement 5-6 par baleinier) sont mises à l'eau avec 1 harponneur, 4 marins qui n'ont que pour rôle de souquer et le capitaine de la baleinière (généralement un second du capitaine du navire). La baleinière est donc autonome et doit rejoindre la cible, ce qui peut mettre 2 bonnes heures. L'harponneur doit ensuite lancer 2 harpons sur le cachalot, qui cherchera alors à fuir et à sonder. Cependant, ce n'est pas l'harponneur, mais le capitaine de la petite baleinière qui doit achever le cachalot avec une lance. Une fois un point vital du cachalot touché, il s'agite brutalement, les baleinières doivent immédiatement s'écarter. La carcasse est finalement remorquer jusqu'au baleinier, en espérant que des requins ne s'en nourrissent pas lors du trajet.
Cependant, ce récit suppose un cachalot très calme. Il est très courant que le cachalot arrive à détruire une ou plusieurs baleinières, tuant parfois des baleiniers au passage. Il n'est donc pas rare que le cachalot réussisse à s'échapper.
Le traitement du lard du cachalot se fait donc à bord. Le cachalot, une fois mort, est transporté jusqu'au baleinier par une ou deux baleinières, et est généralement hissé à tribord, la tête vers l'arrière. La tête est d'abord arraché (ce qui demande de solides connaissances anatomiques, car le cou du cachalot est invisible), puis pendant 3-4 heures, on arrache ensuite de large bande de lard (comme une orange).
Cette opération commence par le creusement d'un trou près de la nageoir pectoral de l'animal, on y accroche ensuite un croc en fer. Ce croc est relié à un cabestan qui, en tirant, fait tourner l'animal sur lui-même et permet d'obtenir une longue bande de lard. Cette bande est ensuite découpée en rectangle. Ces morceaux de lard sont jetés dans des espèces de grosses marmites.
Représentation d'une bande de lard arrachée d'un cadavre d'un cachalot. Les requins guettent. La représentation vient du livre "Le Grand Cachalot" de Jacques Soulaire.
Sur le pont du baleinier, on trouve un "try-works" en brique rouge, avec deux marmites.
"Try-works" du baleinier "Charles Morgan" encore conservé. Le système trouve probablement son origine dans un système inventé par le baleinier français Martin Sipote lors de ces chasses au Nord de l'Europe, qui ne pouvait pas disposer de station-côtière pour fondre le lard, à cause de la forte présence militaire hollandaise et anglaise.
Cette partie du travail est la plus longue, elle demande 3-4 jours. Pendant la fonte du lard, qui donne l'huile, le lard doit être constamment remué et le feu doit garder la même intensité.
L'opération dégage une forte odeur, avec de grandes fumées qui salissent les voiles en plus de dégager une forte chaleur. Pour obtenir une huile de la meilleur qualité, le lard doit être directement fondue, ce qui n'a pas toujours été le cas. En effet, quand les américains ont commencé à utiliser de véritable baleinier (au lieu de regarde l'horizon à partir du rivage), ils n'utilisaient de try-works ils conservaient donc le lard dans la cale.
Après la fonte, l'huile est stockée dans des barils de plus de 100 litres. Un navire de 400 tonneaux (donc de moyenne-haute) peut stocker 2.500 barils d'huile, suffisant pour 30 cétacés de bonne taille. Un immense cachalot de plus de 21 mètres capturé au XIXe siècle a d'ailleurs fournit 146 barils d'huile (+ 16,000 litres d'huile) dont 25 barils de spermaceti.
Cependant, ce genre est capture est exceptionnelle. Le record français de cette époque est détenu par le baleine "l'Adèle" en 1837, qui revient avec 3900 barils d'huile, après avoir chassés 58 grands cétacés.
L'apogée de la chasse aux cachalots du XIXe siècle est, pour les américains, l'année 1837. Pour toute la décennie, ils ont produit avec 40 millions de gallons d'huile. Cette performance incita à construire des baleiniers. On compte ainsi 594 baleiniers américains (3/4 de la flotte baleinière mondial) en 1837, puis 729 baleiniers américains en 1846.
Suite à plusieurs innovations technologiques au XIXe siècle, comme l'éclairage au gaz et le pétrole, l'industrie baleinière sera obligée de se réinventer, à la fois avec des méthode de chasse plus rentable (ce qui va donner la "chasse moderne") et une plus grande variété de produit (par exemple le savon).
Le 01 novembre 2022 à 20:49:24 :
Intéressant clé
Merci beaucoup 
.
Le 01 novembre 2022 à 20:51:34 :
Et moi qui pensais qu'on allait sérieusement parler des " bbw " qu'on kiff IRL sans que je sois pris pour un déviant fou à lier
D'accord le taréent .
Le 01 novembre 2022 à 20:55:45 :
pas tout lu mais je up pour l'effort
Merci .
Le 01 novembre 2022 à 20:56:04 :
je up, topic intéressant
Merci .
Données du topic
- Auteur
- Pyramodologue3
- Date de création
- 1 novembre 2022 à 20:34:32
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