Topic de VenezFrire :

[14-18] Ce témoignage d'un soldat Français ENTERRÉ VIVANT

Journée du 15 juillet 1916, contre-offensive française pour dégager Souville et reprendre Fleury. Témoignage de G. MARYBRASSE, soldat au 115e R.I. :

" Un obus éclate si près de moi (1,50 m à peine) que je vois très nettement une boule de feu. Par miracle, je ne suis que légèrement blessé, et je vais dans un petit gourbi, à flanc de ravin pour y attendre la relève. Je partage l'étroit abri avec un autre blessé. Avec quelle joie je savoure la possibilité de pouvoir m'étendre enfin, chose inespérée depuis onze jours ! Mon camarade sur le dos, moi sur le côté, nous nous endormons. Tout à coup, un tir de barrage éclate tout près et un obus tombe juste au-dessus de nous, nous ensevelissant. Alors pour nous, le bombardement devient lointain, lointain… je me rends compte du tragique de la situation ; si personne ne vient à notre secours, nous sommes perdus. Le malheureux qui partage ma tombe est étouffé par la terre ; trois fois de suite, je l'entends faire rronn, rronn, rronn, puis c'est tout ; je devine qu'il est mort ; il n'a pas souffert longtemps.

De tous mes efforts, j'essaie de me soulever, mais trois mètres de terre nous retiennent prisonniers ; par une habitude heureuse que j'avais toujours au front, j'ai toujours sur la tête mon casque avec jugulaire au menton ; la visière avant retient la terre et l'empêche de m'obstruer la bouche. La tête rabattue sur la poitrine, respirant à peine, je garde néanmoins toute ma lucidité. Je me rends parfaitement compte que tout sera bientôt fini ; alors, comme un film de cinéma, toutes sortes de souvenirs se présentent à ma mémoire, mais surtout, je pense à ma mère, à la peine qui sera la sienne lorsqu'elle saura tout ; puis j'entrevois mon père et mon frère décédés que je vais revoir, mes frères et ma sœur qui pleureront aussi à cause de moi ; alors, avec calme, avec toute ma connaissance, du plus profond de mon cœur, je fais mon acte de contrition, demandant à Dieu d'abréger au plus tôt mon martyre ; puis, des minutes s'écoulent, qui n'étaient peut-être que des secondes, mais qui m'ont paru des heures interminables. Je sens que ma tête bourdonne ; des bruits de cloches semblent sonner très fort, puis plus rien. De nouveau, je reprends connaissance, et à ce moment, je me souviens m'être fait cette réflexion : "Ce n'est pas si dur de mourir…"

Combien de temps suis-je resté ici ? c'est flou, mais assez longtemps, au moins 25 minutes, je l'ai su après. Au déclenchement du barrage, tous les camarades se sont sauvés ; quand cela s'est calmé, ils reviennent. C'est alors que le sergent Sèle s'inquiète de moi. Sèle est un camarade qui a fait notre admiration pendant les journées de Verdun par son courage et son sang-froid. "Où est Marybrasse ?" demande-t-il. C'est alors qu'il s'aperçoit de l'éboulement ; il m'appelle : "Marybrasse, Marybrasse, es-tu là ? " Comme dans un rêve, je l'entends vaguement et ne puis répondre. Persuadé que je suis dessous, il ordonne à quelques hommes de piocher rapidement. J'entends des coups lointains qui se rapprochent ; je me dis : "Ils n'arriveront pas jusqu'à moi…" Enfin, j'entends plus distinctement les coups, j'entends même que l'on parle. Sèle dit à ses hommes : "Attention maintenant. "Je sens une main sur mon casque : "J'en tiens un ! "s'écrie Sèle, et alors, de ses mains, il me dégage vivement la tête.
Comment dire ce que j'ai ressenti à ce moment ? Retrouver la vie au moment où je croyais bien la perdre, sentir l'air pur de la nuit… Tout cela m'a ranimé, je me sens sauvé, je pleure de joie. Je remercie mon sauveur, nous nous embrassons."

La chance de ce type putain, sacré Marybrasse :peur:

Journée du 21 juin 1916, lutte pour l'ouvrage de Thiaumont. Témoignage d'Emile HUET, mitrailleur au 54e R.I. :

" Le 21 juin, en montant à l'attaque, j'ai vu des choses horribles ; des hommes d'un régiment qui était sur notre gauche, au nombre d'une compagnie environ, se trouvaient dans un bout de tranchée qui avait été épargné. Au moment où nous passions, le bombardement était épouvantable. Le tir de barrage est tombé juste sur cette tranchée et a recouvert tous les hommes qui étaient dedans. On pouvait voir la terre se soulever par l'effort de tous ces malheureux. J'ai toujours cette vision devant les yeux. "

https://image.noelshack.com/fichiers/2017/39/3/1506463227-risitaspeur.png

ça me fais penser à une scene de Aurevoir la haut :oui:

Mais sinon l'horreur :malade:

Quel petit veinard ce Maryrbasse :noel:

Journée du 24 février 1916, attaque allemande sur les deux rives. Témoignage de D. SCHLATTER, soldat au 60e R.I. :

"Le 24 février, les blessés commencent à affluer au poste de secours, en arrière de la cote 344. Quel moral chez ces combattants ! Un sergent, pendant qu'on lui coupait la cuisse, broyée par un éclat, chantait la Marseillaise !… "

Le pire sans doute, se faire enterrer vivant par un tir d'obus (assez courant pendant la WWI où les soldats vivaient dans des tunnels pour éviter de mourir sous l'artillerie, seul problème : parfois l'entrée était recouverte par la terre soulevée).

J'ai lu un passage aussi sur la bataille de la Somme, des Anglais qui chargeaient par centaines et qui arrivaient à la tranchée adverse à trois, le reste ayant été fauché par les mitrailleuses.

Mois de mars 1916, attaque allemande sur les deux rives. Témoignage de Julien SANDRIN, sergent au 11e Génie :

" Dans les attaques de Vaux, en mars, j'ai vu un lieutenant de chasseurs qui, le bras gauche broyé par un éclat d'obus, continuait à se battre avec sa main valide. "
" Un mitrailleur a le ventre ouvert; il accourt ici avec ses pauvres mains crispées sur ses intestins qui s'échappent. L'autre m'arrive, la tête bandée de son pansement individuel, soutenu par un camarade. Je le fais asseoir devant moi, sur la petite caisse, mais il a l'air quasi endormi et ne s'aide pas du tout, laissant sa tête brimbaler de droite et de gauche. Je suis pressé et, sentant les autres qui attendent, je lui demande de se mieux prêter au pansement. Mais lui ne cesse de répéter inlassablement : "Oh ! laissez-moi dormir, laissez-moi dormir".
J'enlève la bande qui lui entoure la tête et alors, la chose horrible m'apparaît: toute la moitié de son cerveau, son hémisphère droit tout entier glisse en dehors de son crâne béant et j'éprouve cette sensation terrible de recevoir dans ma main gauche toute la matière cérébrale de ce malheureux qui, la boite crânienne défoncée et vidée en partie de son contenu, continue de me répéter son leitmotiv : "Laissez-moi dormir". Alors je lui dis: "Oui, mon vieux, va, on va te laisser dormir".
Et je vide ma main de son contenu que je remets à sa place, maintenant le tout avec des compresses et une bande... avec quelles précautions et quelle angoisse !... "Va dormir, va, mon vieux". Soutenu sous chaque bras, ce mort vivant fait quelques pas, s'étend dans un coin. Une piqûre de morphine, une couverture et le sommeil, pour toujours. "

Continue khey j'approuve ce topic :ok:

L'horreur de la guerre :)

Jamais un homme ne devrait vivre ça

Je sais pas fou les clés mais je suis très fier de nos soldats et de tout ceux qui se sont battus pour notre liberté

De nouveau, je reprends connaissance, et à ce moment, je me souviens m'être fait cette réflexion : "Ce n'est pas si dur de mourir…"

"Tant pis je meurs" 100 ans plus tôt

Et cela pour des altesses
Qui, vous à peine enterrés,
Se feront des politesses
Pendant que vous pourrirez,

Témoignage de X. :

" Notre poste de secours regorge de blessés. Nous faisons des pansements sans discontinuer et nous disons par signes ce que nous avons à dire : impossible de placer un mot ; on ne peut même pas s'entendre. Je soigne ceux qui sont étendus sur leur brancard, devant le poste de secours devenu beaucoup trop petit pour les recevoir tous. Un malheureux à qui j'essaie de garrotter la fémorale est blessé d'un éclat profond dans la poitrine pendant que je le panse. Un tout jeune caporal m'arrive, tout seul, avec les deux mains arrachées au ras des poignets. Il regarde ses deux moignons rouges et horribles avec des yeux exorbités. Je tâche de trouver un mot qui le console et lui crie : "Que fais-tu dans le civil ? "j'ai alors la réponse navrante qui me serre le cœur et m'empêche de rien ajouter : "Sculpteur", dit-il ! "

Témoignage de R.P. CADET, soldat au 51e D.I. :

" Près de moi, un sergent souffre d'une façon atroce… il a été blessé à la tête et il croit avoir les pieds gelés ; la douleur le fait pleurer. Plus loin, des larmes encore ; un soldat allemand, en délire, appelle sa mère ; il crie, il crie fort, des sanglots se mêlent à ses cris. Il ne se souvient plus que de sa mère ; tout le reste du monde n'existe plus pour lui. "

Témoignage de l'aide-major Emile POITEAU :

Nouveau brouhaha vers l'entrée.
C'est un blessé, la poitrine percée de balles comme un écumoire, et qui vomit le sang à flots. Pansements, piqûres de morfines et d'éther. On l'emporte.
Alors, avec des yeux effrayant, en passant devant le major :
- Est-ce que j'en reviendrai ? Pensez-vous ?
- Mais bien sûr, mon petit, que tu en reviendras ! On ne meurt par pour avoir crachés du sang !…
C'est assurément un mensonge en ce cas. Mais c'est un aumône aussi…
En entendant ça, le petit blessé fait : Ah ! et son œil lance un éclair de joie : Alors, je les reverrai ?
Et vite, il explique :
- C'est que, voyer-vous, j'ai deux petits enfants… Deux et quatre ans… Et ma femme est morte… Il faut que je vive pour eux !…
Touché jusqu'aux larmes, estimant qu'il devait mentir carrément, le médecin affirme :
- Mais bien sûr, bien sûr, que tu les reverras ! je n'ai jamais vu mourir pour un cas pareil… Ainsi, tu vois que tu peux être tranquille !…
Alors le moribond tend au major sa pauvre main déjà pâle comme la main d'un cadavre. Et, comme on l'emporte vers les autos, le médecin reste là, ému, suivant des yeux le brancard qui s'éloigne.
Un blessé dit :
- C'est triste, hein ! M'sieu l'major ?
Et celui-ci répond en branlant la tête :
- Ah ! c'est que j'en ai deux comme lui, moi aussi…"

Ne jamais oublier / Never Forget / Nie Vergessen

Données du topic

Auteur
VenezFrire
Date de création
1 juillet 2019 à 15:39:52
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