La VIE du GOLEM en DEUX PARAGRAPHES
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Mais s’ils ont choisi un genre de vie moins noble, contraire à la philosophie, mais non pas à l’honneur, il ne manquera pas d’arriver, qu’au milieu de l’ivresse ou de quelque autre négligence, leurs coursiers indomptés, ne trouvant pas leurs âmes sur leurs gardes, les conduisent de concert vers un même but
Alors ils prennent le parti le plus digne d’envie aux yeux de la multitude, et s’attachent simplement à jouir. Quand ils se sont satisfaits, ils renouvellent plus d’une fois encore leurs jouissances, mais seulement de loin en loin. Leurs actions ne sont pas approuvées par l’intelligence toute entière.
Le 03 décembre 2024 à 23:26:10 :
Ceux guidés par la sagesse sont maîtres d’eux-mêmes ; réglés dans leurs mœurs, parce qu’ils ont asservi ce qui portait le vice dans leur âme et affranchi ce qui y respirait la vertu.
La vertu et l'homme vertueux sont la mesure de toutes choses. En effet, les opinions sont chez lui en complet accord entre elles, et il aspire aux mêmes choses avec son âme tout entière. Il se souhaite aussi à lui-même ce qui est bon en réalité et lui semble tel, et il le fait (car c'est le propre de l'homme bon de travailler activement pour le bien), et tout cela en vue de lui-même (car il agit en vue de la partie intellective qui est en lui et qui paraît constituer l'intime réalité de chacun de nous).
Il souhaite encore que lui-même vive et soit conservé, et spécialement cette partie par laquelle il pense. L'existence est, en effet, un bien pour l'homme vertueux, et chaque homme souhaite à soi-même ce qui est bon : nul ne choisirait de posséder le monde entier en devenant d'abord quelqu'un d'autre que ce qu'il est devenu (car Dieu possède déjà tout le bien existant), mais seulement en restant ce qu'il est, quel qu'il soit.
Or il apparaîtra que l'intellect constitue l'être même de chaque homme, ou du moins sa partie principale. En outre, l'homme vertueux souhaite passer sa vie avec lui-même : il est tout aise de le faire, car les souvenirs que lui laissent ses actions passées ont pour lui du charme, et en ce qui concerne les actes à venir, ses espérances sont celles d'un homme de bien et en cette qualité lui sont également agréables. Sa pensée enfin abonde en sujets de contemplation. Et avec cela, il sympathise par-dessus tout avec ses propres joies et ses propres peines, car toujours les mêmes choses sont pour lui pénibles ou agréables, et non telle chose à tel moment et telle autre à tel autre, car on peut dire qu'il ne regrette jamais rien.
Les individus d'une perversité courante : ces gens-là sont en désaccord avec eux-mêmes, leur concupiscence les poussant à telles choses, et leurs désirs rationnels à telles autres. C'est par exemple le cas des intempérants, qui, au lieu de ce qui, à leurs propres yeux, est bon, choisissent ce qui est agréable mais nuisible. D'autres, à leur tour, par lâcheté et par fainéantise, renoncent à faire ce qu'ils estiment eux-mêmes le plus favorable à leurs propres intérêts.
Et ceux qui ont commis de nombreux et effrayants forfaits et sont détestés pour leur perversité en arrivent à dire adieu à l'existence et à se détruire eux-mêmes. De même encore, les méchants recherchent la société d'autres personnes avec lesquelles ils passeront leurs journées, mais ils se fuient eux-mêmes, car seuls avec eux-mêmes ils se ressouviennent d'une foule d'actions qui les accablent et prévoient qu'ils en commettront à l'avenir d'autres semblables, tandis qu'au contraire la présence de compagnons leur permet d'oublier.
De plus, n'ayant en eux rien d'aimable, ils n'éprouvent aucun sentiment d'affection pour eux-mêmes. Par suite, de tels hommes demeurent étrangers à leurs propres joies et à leurs propres peines, car leur âme est déchirée par les factions : l'une de ses parties, en raison de sa dépravation, souffre quand l'individu s'abstient de certains actes, tandis que l'autre partie s'en réjouit ; l'une tire dans un sens et l'autre dans un autre, mettant ces malheureux pour ainsi dire en pièces.
Et s'il n'est pas strictement possible qu'ils ressentent dans un même moment du plaisir et de la peine, du moins leur faut-il peu de temps pour s'affliger d'avoir cédé au plaisir et pour souhaiter que ces jouissances ne leur eussent jamais été agréables : car les hommes vicieux sont chargés de regrets.
Ainsi donc, il est manifeste que l'homme pervers n'a même pas envers lui-même de dispositions affectueuses, parce qu'il n'a en lui rien qui soit aimable. Si dès lors un pareil état d'esprit est le comble de la misère morale, nous devons fuir la perversité de toutes nos forces et essayer d'être d'honnêtes gens. Ainsi pourrons-nous à la fois nous comporter en ami avec nous-mêmes et devenir un ami pour un autre.
Le 03 décembre 2024 à 23:28:07 :
Le 03 décembre 2024 à 23:26:10 :
Ceux guidés par la sagesse sont maîtres d’eux-mêmes ; réglés dans leurs mœurs, parce qu’ils ont asservi ce qui portait le vice dans leur âme et affranchi ce qui y respirait la vertu.La vertu et l'homme vertueux sont la mesure de toutes choses. En effet, les opinions sont chez lui en complet accord entre elles, et il aspire aux mêmes choses avec son âme tout entière. Il se souhaite aussi à lui-même ce qui est bon en réalité et lui semble tel, et il le fait (car c'est le propre de l'homme bon de travailler activement pour le bien), et tout cela en vue de lui-même (car il agit en vue de la partie intellective qui est en lui et qui paraît constituer l'intime réalité de chacun de nous).
Il souhaite encore que lui-même vive et soit conservé, et spécialement cette partie par laquelle il pense. L'existence est, en effet, un bien pour l'homme vertueux, et chaque homme souhaite à soi-même ce qui est bon : nul ne choisirait de posséder le monde entier en devenant d'abord quelqu'un d'autre que ce qu'il est devenu (car Dieu possède déjà tout le bien existant), mais seulement en restant ce qu'il est, quel qu'il soit.
Or il apparaîtra que l'intellect constitue l'être même de chaque homme, ou du moins sa partie principale. En outre, l'homme vertueux souhaite passer sa vie avec lui-même : il est tout aise de le faire, car les souvenirs que lui laissent ses actions passées ont pour lui du charme, et en ce qui concerne les actes à venir, ses espérances sont celles d'un homme de bien et en cette qualité lui sont également agréables. Sa pensée enfin abonde en sujets de contemplation. Et avec cela, il sympathise par-dessus tout avec ses propres joies et ses propres peines, car toujours les mêmes choses sont pour lui pénibles ou agréables, et non telle chose à tel moment et telle autre à tel autre, car on peut dire qu'il ne regrette jamais rien.
Les individus d'une perversité courante : ces gens-là sont en désaccord avec eux-mêmes, leur concupiscence les poussant à telles choses, et leurs désirs rationnels à telles autres. C'est par exemple le cas des intempérants, qui, au lieu de ce qui, à leurs propres yeux, est bon, choisissent ce qui est agréable mais nuisible. D'autres, à leur tour, par lâcheté et par fainéantise, renoncent à faire ce qu'ils estiment eux-mêmes le plus favorable à leurs propres intérêts.
Et ceux qui ont commis de nombreux et effrayants forfaits et sont détestés pour leur perversité en arrivent à dire adieu à l'existence et à se détruire eux-mêmes. De même encore, les méchants recherchent la société d'autres personnes avec lesquelles ils passeront leurs journées, mais ils se fuient eux-mêmes, car seuls avec eux-mêmes ils se ressouviennent d'une foule d'actions qui les accablent et prévoient qu'ils en commettront à l'avenir d'autres semblables, tandis qu'au contraire la présence de compagnons leur permet d'oublier.
De plus, n'ayant en eux rien d'aimable, ils n'éprouvent aucun sentiment d'affection pour eux-mêmes. Par suite, de tels hommes demeurent étrangers à leurs propres joies et à leurs propres peines, car leur âme est déchirée par les factions : l'une de ses parties, en raison de sa dépravation, souffre quand l'individu s'abstient de certains actes, tandis que l'autre partie s'en réjouit ; l'une tire dans un sens et l'autre dans un autre, mettant ces malheureux pour ainsi dire en pièces.
Et s'il n'est pas strictement possible qu'ils ressentent dans un même moment du plaisir et de la peine, du moins leur faut-il peu de temps pour s'affliger d'avoir cédé au plaisir et pour souhaiter que ces jouissances ne leur eussent jamais été agréables : car les hommes vicieux sont chargés de regrets.
Ainsi donc, il est manifeste que l'homme pervers n'a même pas envers lui-même de dispositions affectueuses, parce qu'il n'a en lui rien qui soit aimable. Si dès lors un pareil état d'esprit est le comble de la misère morale, nous devons fuir la perversité de toutes nos forces et essayer d'être d'honnêtes gens. Ainsi pourrons-nous à la fois nous comporter en ami avec nous-mêmes et devenir un ami pour un autre.
Dans chaque âme trois parties différentes, deux coursiers et un cocher.
Des deux coursiers, avons-nous dit, l’un est généreux, l’autre ne l’est pas.
Le premier, d’une noble contenance, droit, les formes bien dégagées, la tête haute, les naseaux tant soit peu recourbés, la peau blanche, les yeux noirs, aimant l’honneur avec une sage retenue, fidèle à marcher sur les traces de la vraie gloire, obéit, sans avoir besoin qu’on le frappe, aux seules exhortations et à la voix du cocher.
Le second, gêné dans sa contenance, épais, de formes grossières, la tête massive, le col court, la face plate, la peau noire, les yeux glauques et veinés de sang, les oreilles velues et sourdes, toujours plein de colère et de vanité, n’obéit qu’avec peine au fouet et à l’aiguillon.
Quand la vue d’un objet propre à exciter l’amour agit sur le cocher, embrase par les sens son âme tout entière, et lui fait sentir l’aiguillon du désir, le coursier, qui est soumis à son guide, dominé sans cesse, et dans ce moment même, par les lois de la pudeur, se retient d’insulter l’objet aimé ; mais l’autre ne connaît déjà plus ni l’aiguillon ni le fouet, il bondit emporté par une force indomptable, cause les disgrâces les plus factieuses au coursier qui est avec lui sous le joug et au cocher, les entraîne vers l’objet de ses désirs et après une volupté toute sensuelle.
D’abord ceux-ci résistent et s’opposent avec force à une violence indigne et coupable. Mais à la fin, lorsque le mal est sans bornes, ils s’abandonnent au coursier fougueux, et promettant de faire ce qu’il voudra, s’approchent et contemplent de près la beauté toute resplendissante de l’objet chéri.
À cette vue la mémoire du guide se reporte vers l’essence de la beauté, il la voit s’avancer chastement à côté de la sagesse.
Saisi de crainte et de respect, il tombe en arrière, ce qui le force de retirer les rênes avec tant de violence que les deux coursiers se cabrent, l’un de bon gré puisqu’il ne fait pas de résistance, mais l’autre, le coursier indocile, avec regret et avec fureur. En reculant, le premier, encore tout confus et tout ravi, inonde l’âme toute entière de sueur et d’écume ; l’autre, déjà guéri de l’impression du frein et de la douleur de sa chute, ayant à peine repris haleine, se répand en outrages et en injures contre son compagnon et contre le cocher lui-même ; il leur reproche leur timidité et leur lâcheté à soutenir l’attaque concertée ; enfin, malgré leur refus de le suivre, il les force de céder encore une fois et n’accorde qu’avec peine à leurs instances un moment de délai.
Ce temps une fois passé, s’ils feignent de ne plus y penser, il réveille leur souvenir et leur fait violence ; hennissant et bondissant il les entraîne, et les force de hasarder auprès de l’objet aimé une nouvelle tentative. À peine arrivé près de lui il se couche, s’allonge, et se livrant aux mouvements les plus lascifs, mord son frein, et tire en avant avec effronterie.
Le cocher cependant éprouve plus fortement encore qu’auparavant la même impression de terreur, et se rejetant en arrière, comme il arrive souvent dans les courses quand on fait effort pour franchir la barrière, il retire avec plus de violence que jamais le frein entre les dents du coursier rebelle, ensanglante sa bouche et sa langue insolente, et meurtrissant contre terre les jambes et les cuisses de l’animal fougueux il le dompte par la douleur. Lorsqu’à force d’endurer les mêmes souffrances, le méchant s’est enfin corrigé, il suit humilié la direction du cocher, mourant de crainte dès qu’il aperçoit le bel objet dont il est épris.
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Données du topic
- Auteur
- MaxdeHabsbourg
- Date de création
- 3 décembre 2024 à 23:19:17
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