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« Le plus jeune avait 17 ans… » : ce village reconstitue l’histoire de ses soldats morts en 14-18

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Abjat-sur-Bandiat a perdu 65 Poilus pendant la Première Guerre mondiale. Dominique Villeveygoux et Maryline Allafort ont mené l’enquête pour leur rendre hommage. Le résultat de leurs recherches sera présenté lundi 11 novembre, à l’occasion de la commémoration de l’Armistice

Ils s’appelaient Méry Grenouillet, Louis Glangetas, Elie Valeix, Henri Puizillou, Jean Doumain… Leurs noms sont gravés dans la pierre à Abjat-sur-Bandiat, en Dordogne. Ils sont lus chaque année, chaque 11 novembre, au pied du monument aux morts, parmi ceux des soldats de ce bout du Périgord vert tombés pendant la Première Guerre mondiale.

« Mais une liste, ça a un côté impersonnel, abstrait » : c’est en partant de ce constat et à la demande de la municipalité que Dominique Villeveygoux, amateur passionné d’histoire, s’est lancé dans une minutieuse enquête sur les traces de ces Poilus.

Le résultat de ses recherches sera présenté lundi, à l’occasion de la commémoration de l’Armistice. Avec, pour chacun de ces « enfants d’Abjat tombés pendant la Grande Guerre », une notice retraçant le plus précisément possible son parcours.

Dominique Villeveygoux raconte : « Je suis parti des deux listes du monument aux morts et de l’église. J’ai pu consulter la fiche correspondant à chaque nom sur le site Mémoire des hommes, puis les livrets militaires, à Périgueux ou à Limoges. De là, j’ai pu retrouver les extraits de naissance, les noms des parents, des villages, les professions [NDLR : surtout des cultivateurs], les mariages, les enfants… »

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Adjudant chez les zouaves, Louis Glangetas est mort en 1916, dans la Meuse.

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Méry Grenouillet, incorporé dès 1913, a été tué en juin 1915 en Alsace. Il avait 23 ans.

Maryline Allafort, conseillère municipale, lui a ouvert les archives de la mairie et l’a accompagné dans un véritable travail de fouilles. Au fil des documents exhumés s’écrit le récit de cette guerre qui devait être la Der des ders.

Partis en tramway

Avec la mobilisation générale, le 2 août 1914, Dominique Villeveygoux estime que 161 hommes du village de 20 à 38 ans sont partis, en plus des « 48 déjà sous les drapeaux ». « Ils ont pris le tramway à la gare d’Abjat, vers Saint-Pardoux, puis ils ont rejoint Nontron, la gare de rassemblement. » Entre septembre et décembre 1914, une cinquantaine d’autres, âgés de 39 à 42 ans, ont été appelés à leur tour, et ainsi de suite, pour incorporer les hommes de 43 à 45 ans, puis ceux de 48 à 60 ans, et au fur et à mesure les jeunes de 19 ans.

« Il fallait de la chair à canon », s’émeut Maryline Allafort. 424 Abjacois sont montés au front, 65 ne sont jamais revenus. Le premier tombé au champ d’honneur s’appelait Jean Faure. Soldat de 2e classe, il est mort « à Ingersheim, en Alsace, à 21 ans et huit mois », le 22 août 1914. « On le considère porté disparu », précise Dominique Villeveygoux.

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Jean Faure fut le premier Abjacois tué, le 22 août 1914.

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Instituteur, Henri Puizillou est tombé au champ d’honneur à 34 ans, en octobre 1915.

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Elie Valeix, cultivateur à Ménesplier, mort à 26 ans à Chattancourt, dans la Meuse.

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Des Poilus à Chattancourt, qui furent peut-être les camarades d’Elie Valeix.

« Les soldats d’Abjat sont partis sur tous les fronts » et le passionné d’histoire a multiplié les courriers afin d’obtenir des portraits de ces hommes et des images des lieux de leur mort et de leur sépulture loin du Périgord. Un responsable d’un office de tourisme grec, touché par sa démarche, a parcouru une centaine de kilomètres pour photographier la tombe d’Henri Yonnet, dans la nécropole de Zeitenlik.

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Henri Yonnet repose dans la nécropole de Zeitenlik, en Grèce.

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Le tunnel Electra, près de Craonne, où François Dessimoulie a été tué le 5 mars 1918.

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C’est à Ostel, dans l’Aisne, que le soldat 2e classe Jean-Baptiste Gaudy est tombé, à 20 ans et 13 jours, le 11 août 1917.

Autre témoignage émouvant, cette lettre d’un soldat à sa fiancée. C’est leur petit-fils, Pierre Castellan, qui est venu la confier à Maryline Allafort pour enrichir l’exposition du 11 novembre. « C’est un des rares souvenirs qu’il a de son grand-père, Ludovic Morand, qu’il a peu connu. Lui est revenu du front, il est devenu juge de paix à Nontron. Il avait perdu ses deux jambes et un petit doigt. »

Dans cette tragédie collective, Dominique Villeveygoux a été particulièrement marqué par des drames individuels : « Parmi tous ces morts, le plus jeune avait 17 ans et 10 mois. » Jean Doumain s’était engagé à ses 17 ans révolus, le 17 février 1915, à Paris. Grièvement blessé à la bataille d’Artois, il a succombé dix mois plus tard.

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Cette lettre touchante, adressée par un soldat à sa fiancée, a été confiée aux organisateurs par le petit-fils du couple, un habitant du village.

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Hollebeke, en Belgique. C’est sur ce champ de bataille qu’André Boissard a disparu, à 20 ans et 10 mois. Son corps n’a jamais été identifié.

Maryline Allafort frissonne aussi en pensant au « déchirement incroyable » des mères qui ont perdu deux fils. « Il y a trois familles dans ce cas à Abjat », précise Dominique Villeveygoux. Les deux aînés des Laplagne, agriculteurs à Puyfromental, tous deux prénommés Jean, sont morts le 6 septembre 1914, l’un dans la Meuse, l’autre dans la Marne. Leurs corps n’ont jamais été retrouvés.

https://www.sudouest.fr/culture/histoire/le-plus-jeune-avait-17-ans-ce-village-de-dordogne-reconstitue-l-histoire-de-ses-soldats-morts-en-14-18-22072570.php

Les gars qui se battent et risquent leur vie pour leur pays, ce sont des heros ou des golems selon vous? Et pourquoi ?
on s'en bas les couilles de la première guerre et même de la seconde
Très belle initiative. Tous mes ascendants masculins ont été mobilisés, heureusement ils en ont tous réchappé, cependant jamais indemnes.

Le 09 novembre 2024 à 22:53:10 :
Très belle initiative. Tous mes ascendants masculins ont été mobilisés, heureusement ils en ont tous réchappé, cependant jamais indemnes.

Oui, il faudrait généraliser ça dans tous les villages. Le Souvenir français fait également du beau travail.

mourir pour les interets des j

Le 09 novembre 2024 à 22:47:42 :
Les gars qui se battent et risquent leur vie pour leur pays, ce sont des heros ou des golems selon vous? Et pourquoi ?

Des golems non, mais des hommes courageux, oui. Servir de chair à canon tout en sachant pertinemment que ta mort sera peut-être/probablement vaine...

je suis passionné d histoire, et plus particulierement de la periode 39 45 https://image.noelshack.com/fichiers/2024/46/1/1731359685-gbr4r7jbwaaqrtp.jpg
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Date de création
9 novembre 2024 à 22:45:56
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