Nos émotions ont été découpées, ce fut bref, chirurgical.
Nous n'avons rien senti. Nos sourires sont devenus des souvenirs.
Sans comprendre. On s'est levé, on s'est habillé. Par habitude, on a arpenté les mêmes rues, prononcé les mêmes mots, défiguré les mêmes visages.
Mais cette fois les peintures étaient délavées, les bavardages absconds, les faces effacées. Sans comprendre.
On s'est levé sans comprendre qu'on s'en allait.
On regardait la vie se dérouler comme une mauvaise blague qu'on rejetait.
Et puis un beau jour, la mort est apparue impromptue, au bord d'une errance.
Le fleuve était tranquille. C'était le seul que l'on suivait, sans comprendre. Le seul qui allait quelque part.
Je l'ai regardée. Elle m'a regardé. Misérable. Sans le moindre jugement. Comme une loque, une broutille, qui étincèle si on daignait l'essuyer un peu de ses peines.
Elle m'a tendu la main. Et je suis tombé amoureux. Si fou d'elle, que je ne lui ai pas tendu la mienne, pour que l'on reste deux, qu'on ne fasse pas qu'un et que je puisse continuer à la regarder.
Depuis, maladivement, je cache précieusement mes peines. Comme un trésor que je collectionne.
En haillons, les autres hommes ne comprennent pas.
Et moi non plus. Pourquoi je suis resté si malheureux. Pour qu'elle revienne me voir, tous les soirs.
Je me suis perdu si loin, que je n'ai plus qu'elle.
Et je sombre chaque jour un peu plus, bercé par ses yeux froids, n'est-ce pas pitoyable ?
Mais je vous le promets. Je n'ai jamais rien vu d'aussi beau.
Je ne sais pas si je suis possédé. Je ne sais pas si je suis malade. Mais de toute façon, la ou je m'éteins lentement, dans un coin sombre d'une chambre, d'internet, rien de beau ne s'élèvera.
Nous sommes dans un mouroir mes koupins du forom. Personne n'écoute. Tout est si loin. Que je n'entends plus qu'elle.
Bercés par la Mort, sa comptine cruelle est tout ce qui me reste. Je joue tout seul à la marelle censée m'amener jusqu'au ciel.
Et meme si je perds, déchu de tout sur la terre, folie ou réalité, qu'importe tant qu'elle est la. Vos émotions, votre bonheur, votre vitalité peut vous quitter. Mais la Mort, elle, ne vous quittera jamais des yeux. Et vous pourrez ainsi renaitre indéfiniment à travers eux.
Du ciel à la terre, je joue et je tombe. Elle me regarde, et c'est tout ce qui compte