Si quelqu’un peut me la stické ca serait cool
L’adulescent était les yeux rivés sur son écran, captivé depuis plus de 4 heures déjà sans qu’il eût réellement la notion du temps écoulé. Les évènements, les couleurs et les sons le maintenaient totalement immergé dans cet univers fictif vécu à la 3ème personne. Les doigts sur son clavier, la souris en parallèle de ce dernier et, un peu plus loin sur la table, complétant le triangle des Bermudes de ses vices, un verre de bière à moitié entamé trônait devant l’écran, à son pied un reliquat séché et visqueux dudit breuvage. Bien qu’il fût en ligne avec ses amis, il était absent : toute son attention était tournée vers son avatar féminin, Ilga Rancenord.
En quoi cette soirée était différente des centaines précédentes ? Un incident vient bouleverser la vie de ce joueur. Alors que la fatigue nocturne caractérisant l’employé du tertiaire se faisait sentir, où les doigts s’engourdissaient, où les paupières vacillaient et que la position assise statique devenait inconfortable, obligeant le joueur à gesticuler tel un pantin, le personnage ne répondait plus. Le joueur avait beau cliquer frénétiquement, tapoter sur son clavier, il se sentait impuissant. Cela pouvait être la présence d’un bug comme les jeux actuels sont remplis tels des boutons d’acné sur le visage d’un adolescent à l’hygiène douteuse cependant, l’avatar, Ilga, commença à se retourner vers le joueur. Le « player » en était sidéré. Quand elle fut de face, ses doigts vinrent en contact avec la paroi de l’écran, et machinalement, l’ouvrir en deux pour pouvoir rejoindre le monde réel. Le joueur s’écarta de son bureau en faisant instinctivement glisser sa chaise en arrière. C’était comme assister à une forme de naissance : les contours de l’écran s’étiraient tels les chairs d’une matrice et pendant se lapse de temps qui dura tout au plus 20 secondes et qui parut figer dans l’éternité, la créature s’extrayait de l’ordinateur. Elle était majestueuse, une femme à la peau d’ébène, grande et sublime. Le joueur en était estomaqué : sa création avait pris vie.
Alors que le joueur s’apprêtait à entamer une conversation pour tout savoir de l’avatar présent, le visage de cette dernière se mis à grimacer. Et soudain, un bruit tonitruant se fit entendre : un fart gras, énorme et qui dura quelques secondes sortie de la naïade, faisant vibrer les figurines de manga présentes dans la pièce. Quand le silence revînt, le visage d’Ilga affichait un sourire satisfait, qui vira au cruel. Le joueur médusé ne comprit pas tout de suite quelle était la raison de cette expression, puis l’odeur lui percuta les narines. Un effluve sauvage et oeufé, brûlant les poumons et intoxiquant son sang de manière quasi-instantanée. Le joueur se mit à tousser face à cette attaque digne d’Ypres en 1915. S’en était trop, il se rua vers la fenêtre pour essayer de balayer cet air vicié par la princesse noir de jais. Cependant son corps en décida autrement et il se mit à vomir sur son canapé cosy, y laissant à vie des tâches d’eczéma sur le tissu traité. Puis se fut le trou noir. Un malaise face à l’insoutenable. Il ne se réveilla que plusieurs heures plus tard, encore sous l’emprise des fumées viscérales du personnage. Elle avait d’ailleurs disparu de la pièce, retournée dans son écran. Elle le fixait. Elle lui fit un clin d’œil et mis son index sur ces lèvres. Il ne jouerait plus jamais comme avant.
