Métaphysique de l'Amant
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Quand l'amant s'échappe par la fenêtre de l'appartement Haussmannien de sa dernière conquête, il ressent ce qu'on ne peut plus ressentir quand la monotonie siège au sein du foyer conjugal, l'adrénaline, ce sentiment existentiel qui nous pousse à l'inconsidérable et qui atteste de notre capacité à jouir de l'expérience du vivant.
Sans le savoir, il a pourtant déjà atteint depuis longtemps le sommet du sentiment amoureux, en effet, il n'est ni dans la possession, ni dans une vision édulcorée de l'amour, il en déguste toutes les formes et en accepte la finalité, tantôt l'étalon, tantôt le psychiatre, l'Amant est l'éternel artisan du spectacle amoureux.
On peut penser qu'historiquement, sa place est celle du brigand, du livreur de lait ou du facteur mais ces images masquent le véritable sens de son existence bien plus salvatrice qu'on peut le croire.
L'amant, ce n'est pas un individu qui est aimé pour ce qu'il est mais pour ce qu'il représente, cette possibilité d'autre chose, d'une autre histoire, d'une autre réalité, d'un échappatoire.
D'emblée, l'amant est le rôle optionnel, l'entropie nécessaire à l'équilibre conjugal, il est de ses confrontations inévitables, au début considéré comme l'adversaire, l'amant s'avère être un élément essentiel à l'évolution du couple au sens large aussi étonnant que cela puisse paraître.
Comme je vous le disais précédemment, l'amant ce n'est pas le Mari, c'est un stratège expérimenté et méticuleux dans son art, un serviteur de l'amour, lui ne souhaite en aucun cas troquer sa liberté contre la pesanteur du ménage qu'il conchie.
Souvent rescapé d'une ancienne histoire sentimentale douloureuse, l'amant a compris qu'aimer se conjugue au pluriel et à décidé d'en aimer le plus possible quitte à y perdre son âme et quelques dents au passage.
Son plan est simple, adopter une démarche empathique, en dire le moins possible sur lui, jouer l'oreille attentive, inviter subtilement l'autre à s'extraire des racines de ses maux le tout d'un air concupiscent, en clair, s'immiscer en l'autre en reflétant ce qu'elle recherche dans son rapport aux autres, elle même.
Dès lors, comme Rilke à son époque, le tour est joué, elle va penser de plus en plus fréquemment à lui et au fil des échanges, elle aura intégré la représentation idéalisée de ce qu'il ne sera jamais vraiment.
Puis vient l'étape de la récolte, après avoir semé en elle les germes du doute, l'amant passe à l'action, l'étalon abandonne les bancs de la prose et s'adonne une nouvelle fois à l'une des plus belles expériences du vivant.
Seulement, après la besogne, les premiers signaux du regret apparaissent chez la concernée, elle veut ce qui est impossible à troquer pour l'amant, sa liberté, son engagement et en observant son refus catégorique, prend conscience de la valeur de ce qu'elle s'apprête à perdre, elle regrette, parfois craque et dévoile ainsi au cocu l'histoire qui avait été jadis dissimulée mais elle peut aussi opter, souvent d'ailleurs, pour le silence de cette aventure éphémère.
Cela donne souvent lieu à des introspections, l'Amant offre une perspective métaphysique intense, il pousse à reconsidérer les frontières de l'amour, son caractère fugace, ses limites, il propose une vision plus nuancée et son départ souvent préméditée est une leçon de vie à celles et ceux qui ont croisé sa route.
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- Particule780
- Date de création
- 14 avril 2024 à 15:41:43
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