https://tempspresents.com/2016/01/29/choc-civilisations-mythe-olivier-schmitt/
Ceci est un aveu d’échec. Voilà plus de vingt ans que le livre de Samuel Huntington, Le Choc des Civilisations, a été publié, et scientifiquement démoli au point qu’aucun universitaire spécialisé dans l’étude des Relations Internationales ne le considère comme un ouvrage digne d’intérêt intellectuel. C’est en vain que l’on cherchera dans les programmes des rencontres annuelles de la plus grande association académique professionnelle, l’International Studies Association : nulle part, parmi les travaux présentés depuis 20 ans, on ne trouvera trace de l’utilisation de la thèse d’Huntington comme cadre conceptuel pour étudier les phénomènes internationaux. De même, aucun ouvrage publié chez les grands éditeurs académiques (Cambridge UP, Oxford UP, Cornell UP, Princeton UP, Routledge, Palgrave, etc.) et aucun article dans les principales revues de la discipline ne se réfère à Huntington dans ses analyses. Autant dire que le concept de « choc des civilisations » est scientifiquement mort, enterré sous le poids de ses contradictions et de ses impasses, et c’est même l’un des rares cas de consensus scientifique dans une discipline très contradictoire.
Et pourtant, pas un jour ne passe sans que le terme ne revienne dans la bouche d’un dirigeant politique, d’un journaliste ou d’un citoyen. Qu’un nouveau conflit éclate, et il ne manquera pas de circuler un article au titre racoleur tordant les faits pour les faire coller au concept. Des personnalités que l’on pourrait supposer intelligentes aux habitués du café du commerce qui fustigent les parlottes universitaires prétendument déconnectées de la réalité, tout le monde semble s’accorder à dire qu’après tout Huntington n’avait peut-être pas tort.
Cette PLS