Bordel, l'USINE a ASPIRE mon AME
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En 4 mois l'usine m'a vidé de toutes mes forces et de toute ma volonté de vivre
Moi qui me rêvais Philosophe comme Rousseau, Révolutionnaire comme Robespierre, Militaire comme Gambetta ou Président comme De Gaulle, je me retrouve englué dans ma condition de 0 tout pontier à l'usine
Vendredi dernier j'étais en train de chialer en rangeant des fardeaux de barres d'acier et le chef d'équipe m'a surpris par derrière. J'ai sursauté, fait tomber la télécommande et j'ai trébuché sur des barres qui m'ont envoyé le cul par terre
Après la visite du directeur général j'ai voulu initié un mouvement de grève mais je me suis souvenu de mon charisme négatif et je me suis retrouvé seul à la faire avec deux gars qui n'avaient pas envie de travailler
Je n'ai plus rien qui me raccroche à la vie comme j'ai perdu toute espérance
Je me suis donné un objectif il y a quelques temps : être le plus gentil possible mais même là j'échoue par timidité et par honte de faire des bonnes actions, ne me sentant pas légitime d'en recevoir les bénéfices ultérieurs
Si rien ni personne ne me vient en aide, je suis FINITO, je suis comme attiré naturellement pour les agissements contraire à mes intérêts et à ceux de la salvation de mon âme
Il n'y a que la contrainte qui pourrait m'extirper de ce malentendu entre le destin et moi
Le 30 octobre 2023 à 01:39:48 CarpeArcEnCiel a écrit :
Pourquoi tu ne te contentes pas du RSA tel un seigneur clé ?Car là tu cotises c'est bien mais visiblement tu es trop intelligent pour ça et donc tu en souffres
J'ai été au RSA trois mois et j'ai eu l'impression de ne plus appartenir à l'humanité. Travailler me donne l'impression, d'un faux semblant seulement, d'être dans une voie encourageante pour mon futur
Le 30 octobre 2023 à 01:42:56 chak-D a écrit :
Go chantier bâtiment.. a l’aire libre c’est déjà mieux
Je suis trop maladroit pour faire un quelconque métier manuel. Dis-toi que je n'arrive toujours pas à cercler les fardeaux avec du fil de fer après 4 mois. Ma seule compétence c'est mon esprit docile et peureux qui me fait travailler deux fois plus que les autres malgré mon incompétence
Le 30 octobre 2023 à 01:51:19 RandomOrton a écrit :
Le 30 octobre 2023 à 01:45:28 :
Le 30 octobre 2023 à 01:42:56 chak-D a écrit :
Go chantier bâtiment.. a l’aire libre c’est déjà mieuxJe suis trop maladroit pour faire un quelconque métier manuel. Dis-toi que je n'arrive toujours pas à cercler les fardeaux avec du fil de fer après 4 mois. Ma seule compétence c'est mon esprit docile et peureux qui me fait travailler deux fois plus que les autres malgré mon incompétence
Ayaaaa le cerclage, je me trompais toujours de côté les premières semaines, le binôme qui me prenait pour le dernier des abrutis
Non khey je ne fais pas de cerclage. Je suis pontier mais je dois parfois utiliser du fil de fer pour serrer les fardeaux de ferrailles et des barres qui vont en réparation
C’est très bien comme démarche khey.
Faire des bonnes actions c’est pas facile même pour un chrétien. Il faut d’abord se pardonner et s’accepter avant cela. Les évangiles peuvent t’aider
"Hein euuuuuuh quoi quoi? ah merde... c'est l'heure... 3h35... l'usine"
Toujours seul, toujours puceau, toujours triste, personne à côté de moi dans ce grand lit. Je me réveille difficilement et j'allume la lumière dans ma chambre Lidl en bordel et puant le sperme.
Je vire ma couette, assit sur le côté gauche du lit je me lève puis j'enfile un boxer célio et mon jogging, je descends dans la cuisine pour manger vite fait. Dehors il fait nuit noire et sûrement frais. Je vois ces abrutis de papillons de nuit attirés par la lumière, se poser sur les fenêtres. Ils sont vraiment cons ces insectes.
Je tremble à cause de la fatigue et de la fraîcheur de l'air, je me verse un café de la veille, je le passe au micro onde vite fait et je l'avale en 3 gorgées. Je mange 2 tranches de brioche et je vais dans la salle de bain.
Je me brosse les dents, il est 3h50, je me lave le visage mais avant ça je m'observe. J'observe ma gueule dépitée de puceau tardif bossant à l'usine. Je suis cerné, calvitié, j'ai aussi des marques rouges de la veille dues à de l'acné et à un rasage trop agressif.
Je soupire et j'ai une grosse pression dans ma poitrine. Bon je taille.
Évidemment je n'oublie pas mon sac d'usiniste. A l'usine tout le monde a un sac, souvent un sac kipsta éclaté ou un décathlon pas cher, à l'intérieur on y met le casse dalle, dans une boîte en plastique souvent. Je prépare le mien la veille, j'y mets toujours la même chose : un jambon beurre éco+, un sachet de chips Lidl, une brioche aux pépites de chocolat noir maître Jean-Pierre (cimer chef), une banane, une pomme. Quand je suis à l'usine j'ai tout le temps faim.
4h00 il est l'heure que j'y aille. Habitant dans le nord, il fait toujours moins de 15°C la nuit et j'ai donc froid, j'ai froid dehors, j'ai froid dans ma caisse. J'allume les feux et je démarre, je fous le chauffage à fond puis je roule tranquille direction l'usine, j'ai environ 8 minutes de trajet et je prends tout le temps la même route. Le chauffage souffle de l'air froid tout le long du trajet, il se réchauffe un peu juste avant l'arrivée sur le parking de l'usine.
Je ne roule ni vite ni lentement, des fois j'éteins mes feux et j'essaie de rouler à la lumière de la lune comme les truands dans les films mais je ne fais ça que 3 secondes car je ne vois vraiment rien.
Une fois arrivé à l'usine je me gare puis j'arrive au tourniquet, je sors mon badge j'entre dans le site (tout est grillagé) puis je vais aux vestiaires. L'enfer commence.
En général peu de gens disent bonjour. On s'en branle on veut juste que les 8 heures d'enfer se terminent le plus rapidement. Travaillant dans l'agro, je dois porter un pantalon en coton blanc ainsi qu'une veste en coton blanc. Je me dirige vers les cintres ou sont rangés les habits propres et comme d'habitude, rien à ma taille. Je suis de taille normale et de poids normal mais les habits à ma taille sont soit troués ou volatilisés, merci aux cons qui prennent 3 chemises et 3 pantalons puis qui les planquent dans leur casier. Du coup je me retrouve avec un futal qui traîne par terre et une chemise qui me sert de voile, je suis grotesque.
J'ai aussi mes chaussures de sécurité bien sûr, inconfortables au possible et qui défoncent le dos.
Je passe devant les chiottes, je quitte les vestiaires puis je pointe. Prise de poste à 4h30 mais je dois arriver à 4h25 afin que le collègue avant moi me donne la relève. Souvent la journée se passe normalement, des fois c'est la merde et dans ce cas la je suis tout seul à gérer des pannes, des commandes à rattraper ou d'autres trucs chiants.
Si je devais résumer mon travail ce serait : courir partout dans l'atelier et courir encore plus quand ça merde. Rien de plus. Je m'occupe de 4 lignes de production, je dois avoir l'oeil sur tout et à tout moment, parfois je fais de la manutention. C'est très chiant et aliénant, personne ne parle car il y a trop de bruit dans l'atelier.
De toute façon de quoi parler et avec qui ? On parle souvent de la boucle sur ce forum mais la plus grosse boucle c'est l'usine et de loin. Les mecs qui viennent la tous les jours depuis des années sont atteints mentalement. Je les estime mais ils ont un grain. Certains n'ont qu'un seul sujet de conversation, leur jardin, leurs achats (la plupart sont de gros consuméristes), les voitures ou les jeux vidéos. Ça s'arrête la. Des fois on rencontre des gens intéressants et assez malins, on se demande comment ils ont pu atterrir ici, dans ce merdier.
Les pires sont ceux qui ne parlent QUE de l'usine, c'est rare mais c'est le cas de certains, si on a le malheur de les rencontrer au café ou au supermarché, ils parleront des pannes, des commandes à venir, des erreurs commises par tel ou tel employé, de la conjoncture économique dans l'industrie agroalimentaire (des remarques qui ne viennent pas d'eux mais qu'ils répètent sans cesse et de jours en jours).
Du coup j'attends la pause, et je pense. Je pense énormément car c'est la seule chose à faire. Je pense à Karl Marx et au surtravail, je pense aux gamins dans les usines d'allumettes au XVIIIe siècle en Angleterre, je me dis que c'est pas si mal ici finalement.
Puis je pense à mes collègues du lycée, certains sont ingénieurs, d'autres profs, d'autres sont partis en médecine et je me dis que je devrais en finir. Je pense à une fille en particulier qui est en 6e année de médecine. La question du déterminisme m'obsède et me terrifie. Et si j'avais fait si, si à ce moment là j'avais fait ça est ce que j'aurais pu ...? Souvent je me dis, non. Trop pauvre, trop moche, trop faible, trop con, trop prolo.
J'aurais pu lancer les dés 100 fois de suite j'aurais tout de même fini ici dans cette usine atroce, et elle aurait toujours finie pédiatre et dans les bras de son bg 8/10.
8h20 je taille en pause. Mon poids a tendance à chuter dangereusement depuis que je suis à l'usine, alors je mange beaucoup contrairement à certains. Je me tape souvent des réflexions amicales des boomeurs matrixés "eh bah je t'emmènerai pas au resto avec moi!" ou encore "tu vas dormir tout à l'heure avec tout ce que tu manges". Je mange vite, je suis crevé, j'ai envie d'hurler et de pleurer. J'ai envie d'attraper mon voisin par le col, de le secouer et de lui dire "pourquoi on est la? Pourquoi on subit ça ??? C'est donc CA notre existence?"
Retour au boulot, rien de nouveau rien de surprenant, vivement midi trente que je me casse. Une fois l'heure arrivée je passe la relève à mon collègue, je lui souhaite bon courage et je taille, je me change en vitesse puis je sors. Lorsqu'il fait beau le soleil me fait mal aux yeux.
J'arrive chez moi, je dois préparer à bouffer mais j'ai qu'une envie c'est de mourir sur mon canapé et c'est ce que je fais souvent, du moins jusqu'à 14h. Le reste de l'après midi je somnole, comme lors d'un réveil après une anesthésie générale. Des fois je vais faire les courses, le reste du temps je reste chez moi. Je suis trop crevé pour go muscu, je ne connais personne et n'ai personne dans ma vie. Le week end est identique à la semaine sauf que je suis moins fatigué.
Le seul point intéressant est le fric, je gagne pas loin de 2k net par mois et je dépense peu : bouffe, clio de prolo, location de prolo, alcool et c'est tout. Du coup je fais comme mes collègues : je consomme.
En ce moment j'achète des fringues, ça ne me sert à rien car je ne sors jamais, mais j'ai toujours aimé porter des vêtements qui me plaisent, alors j'achète. Lorsque je reçois un colis je me sens heureux et pendant 15 minutes j'oublie presque ma vie misérable d'usiniste dépressif.
Le début de soirée est souvent alcoolisé, ça m'aide à m'endormir. Sous ma couette je rêve d'une autre vie ou d'un cataclysme nucléaire vaporisant toute forme d'existence sur Terre, puis je culpabilise, me disant que les autres n'ont pas une vie aussi merdique et méritent davantage de vivre que moi.
C'est ainsi que se poursuit ma vie, plate et sans saveur, aliénante, frustrante et déprimante. C'est ainsi que fonctionne l'industrie.
Demain ce sera pire.
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Données du topic
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- CochonDinde2022
- Date de création
- 30 octobre 2023 à 01:38:18
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