Le 12 octobre 2023 à 17:01:02 ScorpionSeul a écrit :
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Sinon menacer comment ?
Une étudiante de 22 ans circulant en trottinette a déposé plainte pour blessures involontaires et délit de fuite après avoir été percutée par la voiture du maire de Bordeaux qui était à bord, le jeudi 5 octobre
Camille (1), étudiante de 22 ans originaire du nord de la France, ne quitte plus sa minerve. Le jeudi 5 octobre, alors qu’elle circule en trottinette, elle est percutée par une berline sombre en plein cœur de Bordeaux. Après plusieurs jours de tractations, l’étudiante finit par saisir directement la justice et dépose plainte pour blessures involontaires et délit de fuite. La voiture impliquée est celle du maire de Bordeaux.
Jeudi 5 octobre, 15 h 15. Camille termine sa journée de stage en kinésithérapie et rentre chez elle en trottinette. Au niveau du Jardin public, elle traverse au passage piéton du cours de Verdun menant vers le cours de Gourgue. « J’ai vu la voiture avancer au ralenti, mon feu était vert. Je pensais qu’il allait s’arrêter… Mais il s’est mis à accélérer. J’ai tapé contre la portière côté conducteur. J’ai pris le guidon de ma trottinette dans le ventre, ça m’a fait le coup du lapin. Mais je ne suis pas tombée. » Elle poursuit : « Le conducteur a baissé sa vitre. Il s’est excusé avant d’expliquer qu’il était pressé et qu’il devait rejoindre le cortège de la ministre de la Culture. » La voiture repart. « Je rejoins le trottoir du cours de Gourgue, et là, je fonds en larmes. »
Dix jours d’ITT
Deux témoins de la scène l’entourent : « L’un me dit qu’il a reconnu Pierre Hurmic, le maire de Bordeaux, dans la voiture. Moi, je ne l’ai pas vu. De toute façon, je ne l’aurais pas reconnu, je suis ici pour un stage. » L’autre témoin raconte à « Sud Ouest » : « Il y a eu un choc, la moindre des choses aurait été de descendre du véhicule et de laisser ses coordonnées. La jeune fille était en pleurs. Je lui ai proposé d’appeler les secours. Elle nous a dit que ça allait. »
« J’ai longuement réfléchi avant de me tourner vers la procureure de Bordeaux. La police a juste accepté une main courante »
Camille se rend alors au commissariat de Mériadeck pour porter plainte. « Là, on m’explique que je n’ai pas de blessures, que c’est compliqué. J’ai peut-être fait l’erreur de mentionner le maire de Bordeaux, je ne sais pas. » Elle ressent de violentes douleurs au cou. Direction les urgences. Le diagnostic tombe : entorse cervicale, le médecin lui prescrit dix jours d’ITT.
Le lendemain matin, son école l’incite à porter plainte : « J’ai des antécédents médicaux. S’il devait y avoir des conséquences à long terme pour mon activité, je voulais être couverte. Je n’ai jamais été confrontée à ce genre de situation, ça me dépasse un peu », confie-t-elle.
« Rien n’est normal »
En fin de matinée, Camille pousse donc la porte du commissariat de la Bastide. Elle raconte son histoire, mais se laisse convaincre de ne déposer qu’une main courante. « La police m’a indiqué qu’elle allait se rapprocher de la mairie. Je n’ai pas le temps d’arriver chez moi que je reçois un coup de téléphone du chauffeur. Il me dit qu’il est profondément désolé. Il me confirme qu’il conduisait le maire, qu’ils étaient très pressés et dit vouloir trouver un arrangement. »
Camille le rappelle une heure plus tard pour lui demander des documents : assurance, permis de conduire… « Il m’a rappelée à plusieurs reprises pour que les choses n’aillent pas plus loin. À un moment, je lui ai dit que ça suffisait, je n’ai plus répondu à ses appels. » Après avoir fait le tour de ses proches et une nouvelle consultation chez le médecin, elle décide de retourner au poste de police pour porter plainte : « On me reconnaît aussitôt. Une policière m’explique que si je dépose plainte, je pourrais avoir des problèmes, ma trottinette n’étant pas assurée. J’étais un peu perdue. » Camille ressort interdite. « J’ai longuement réfléchi avant de me tourner vers la procureure de Bordeaux. La police a juste accepté une main courante, ce n’était pas mon choix. Je n’en veux à personne. Mais j’ai eu un accident, personne ne descend, je suis blessée. Dans cette histoire, rien n’est normal ! »
(1) Prénom d’emprunt. La plaignante a souhaité garder l’anonymat.
« Nous serons transparents », assure la mairie
La mairie de Bordeaux confirme que Pierre Hurmic était bien passager du véhicule impliqué dans la collision. Mais elle n’a pas exactement la même version que la plaignante : « Le chauffeur explique qu’il venait de démarrer au feu vert cours de Verdun quand la trottinette est venue percuter l’aile avant gauche du véhicule. Il s’est arrêté net. Il s’est enquis de l’état de la victime avant de repartir. Le chauffeur a proposé de se garer mais la jeune femme a poursuivi sa route vers le cours de Gourgue », explique son cabinet. La mairie précise : « Le chauffeur a contacté l’intéressée pour dresser un constat à l’amiable à transmettre aux assurances. Elle n’y a pas encore donné suite. » Le maire Pierre Hurmic ajoute de son côté : « Les services municipaux seront tout à fait transparents pour établir la vérité des faits. Je souhaite que les conséquences de cet accident ne portent pas préjudice à cette personne. » Quant aux conditions d’accueil de la jeune femme par la police, Eric Krust, adjoint au directeur départemental de la sécurité publique, évoque une « série d’incompréhensions sur la recevabilité de la plainte. C’est pourquoi nous l’avons contactée, dès dimanche, pour lui fixer un rendez-vous, qu’elle nous expose les faits et que nous puissions recueillir sa plainte. Elle n’a pas répondu à notre sollicitation, mais nos services devraient se pencher sur ce dossier puisque le parquet a été saisi. »
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