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[Article] FRANCE : Un paradis Fiscal ?

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Salut les gens,

Quelqu'un à un compte sur le nouvel Obs et pourrait faire tourner cet article ?
Merci !!

https://www.nouvelobs.com/economie/20230428.OBS72718/la-france-paradis-fiscal-des-milliardaires.html

Les ultra-riches disent payer des impôts « colossaux », mais colossaux par rapport à quoi ? Le taux de prélèvement obligatoire qui pèse sur eux est inférieur de moitié à celui que supportent leurs concitoyens. Pour comprendre, plongée au coeur des dispositifs fiscaux.

Sur le plateau, ce 5 avril, quelques esprits s'échauffent sur la réforme des retraites. La routine de BFMTV. D'une voix docte, un entrepreneur chauve la défend : « Allons, le système est en déficit chronique, si on ne fait rien, on va sacrifier votre retraite. »Une jeune gréviste s'énerve : « Mais ce n'est pas à nous de payer ! Regardez les bénéfices de Total. » Et là, clac, l'entrepreneur ferme la discussion : « Vous allez me parler de la fortune de Bernard Arnault, pendant qu'on y est ! »

En France, parler d'une hausse de la fiscalité est aujourd'hui déplacé. Evoquer la fiscalité des milliardaires, c'est pire encore : le comble de la démagogie. C'est bon pour les meetings d'extrême gauche ou les panneaux des manifestations : « ISF, "flat tax", nous, on sait où prendre les sous », « Mangeons les riches »... Lorsque la patronne d'Europe Ecologie-Les Verts, Marine Tondelier, ose rêver tout haut d'une « France sans milliardaires » , la condamnation est immédiate : « Certaines personnes très fortunées ont créé des entreprises, des dizaines de milliers d'emplois... et sont plus utiles que les effets d'estrade de Mme Tondelier » , gronde le ministre de l'Economie Bruno Le Maire. Et puis, répètent la droite et la macronie en boucle, les hyper-riches payent déjà « des impôts colossaux ».

Colossaux, vraiment ? Ce n'est pas si simple. En début d'année, le 18 janvier, un économiste de renom, spécialiste de la fiscalité, professeur à Berkeley en Californie et à l'Ecole normale supérieure en France, Gabriel Zucman, le patron de l'Observatoire européen de la Fiscalité, a lâché sur le plateau de l'émission « C ce soir » un chiffre fou :

« Les milliardaires français ne paient presque aucun impôt sur le revenu. [...] Si vous regardez [...] les 370 ménages aux revenus les plus élevés, donc les 0,001 %, leur taux effectif d'impôt sur le revenu, c'est de l'ordre de 2 %. »

A l'écouter, le seul impôt qui les frapperait vraiment, c'est l'impôt sur les sociétés (IS) prélevé sur les profits des sociétés qu'ils détiennent. Pour lui, il le répète fréquemment : « La France est un paradis fiscal pour les milliardaires. » Comment est-ce possible ?

Une sous-imposition criante

Le chiffre que cite Zucman est tiré d'une étude intitulée « Do Billionaires Pay Taxes ? » (« Les milliardaires paient-ils des impôts ? »). Malgré son titre provocateur, cette analyse, dont la publication définitive est prévue en mai, est extrêmement sérieuse. Quatre économistes (Laurent Bach, Antoine Bozio, Arthur Guillouzouic, et Clément Malgouyres) y ont travaillé durant deux ans sous l'égide du très réputé Institut des Politiques publiques (IPP), un centre de recherche lié à l'Ecole d'Economie de Paris. Arthur Guillouzouic raconte :

« Nous avons eu accès à des données jamais exploitées. Nous avons pu comparer les impositions sur le revenu des 37 millions de foyers fiscaux français, avec les déclarations d'impôt sur la fortune, et les liasses fiscales des entreprises où figurent les détenteurs d'actions des sociétés. »

Résultat : une photo d'une incroyable précision, totalement inédite. Les chercheurs de l'IPP révèlent combien les 0,0001 % des Français du haut de l'échelle des revenus, soit 37 ménages, paient réellement d'impôts. Leurs chiffres s'appuient sur les déclarations fiscales de 2016. A cette époque, les membres de ce club possédaient chacun, en moyenne, un patrimoine de 2,5 milliards d'euros. Avec l'explosion des superprofits en 2021 et 2022, ces fortunes ont encore gonflé. En avril 2023, la France compte 42 milliardaires, dont l'homme et la femme les plus riches du monde, Bernard Arnault (220 milliards d'euros) et Françoise Bettencourt Meyers (88 milliards).

Pour avoir le droit d'exploiter ces informations fiscales explosives, et bien qu'elles soient systématiquement anonymisées, les économistes de l'IPP ont dû disposer d'une habilitation digne du contre-espionnage. Dans un premier temps, la DGFIP (Direction générale des Finances publiques) a envoyé les déclarations cryptées à un groupement d'intérêt public, le CASD (Centre d'Accès sécurisé aux Données), qui a procédé à un premier recoupement des différents fichiers. Puis les informations sont reparties à la DGFIP qui, après les avoir cryptées une seconde fois, les a finalement transmises aux chercheurs. Ceux-ci ont ensuite dû travailler à partir d'un serveur exclusivement accessible par empreinte digitale. « A l'arrivée nous avons reçu un document avec 37 millions de lignes, et 2 000 colonnes. Restait à nous mettre au boulot », rapporte l'économiste Arthur Guillouzouic.

Les 37 millions de foyers fiscaux ont été découpés en 100 tranches. Puis les économistes se sont concentrés sur le dernier centile (les 370 000 foyers les plus aisés, le fameux 1 %), un ensemble qu'ils ont encore partagé en mille unités pour parvenir à cibler les 370 familles les plus fortunées, avec un focus particulier sur les 37 ultra-riches. Le résultat est pour le moins inattendu. Selon les premiers résultats de l'IPP, le taux d'imposition sur le revenu qui pèse sur les 370 premiers foyers fiscaux s'élève en moyenne à seulement 2,5 % (le chiffre brandi par Zucman à la télé).

Plus stupéfiant encore, il descend même à 0,26 % pour les 37 familles tout en haut du tableau ! Un taux d'imposition qui ferait rêver bien des Français. A commencer par tous ceux qui appartiennent au bas de la tranche de ces 370 000 foyers les plus aisés. Ces moins riches parmi les plus riches, qui disposent d'un revenu annuel de 135 000 euros, sont, eux, imposés entre 30 % et 40 % de leurs revenus...

Comment les chercheurs ont-ils pu faire apparaître une telle distorsion ? Tout simplement parce que pour la première fois, ils se sont fondés non pas sur les revenus déclarés au fisc, mais sur le véritable « revenu économique » des foyers fiscaux. En clair, ils ont pris en compte le revenu produit par les patrimoines professionnels des plus aisés (pour la plupart des entrepreneurs), composés principalement d'actions. Ainsi, si vous détenez 10 % du groupe Tartempion, et que le groupe Tartempion dégage un bénéfice de 1 milliard, votre « revenu économique » est de 100 millions. Il peut se traduire par des plus-values ou des dividendes, mais tant que ceux-ci restent dans votre holding familial, ils ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu...

Cette sous-imposition est encore plus criante quand on examine une autre taxe : l'impôt sur la fortune immobilière (Ifi), qui a succédé à l'ISF. Les plus fortunés ont beau posséder des châteaux ou des villas d'une valeur de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de millions d'euros, ils bénéficient à plein d'un mécanisme bien connu des fiscalistes : le plafonnement. Un contribuable français ne peut en effet être imposé à l'Ifi au-delà de 75 % de ses revenus perçus. Mais comme on l'a vu, les revenus déclarés au fisc ne sont pas les « vrais » revenus économiques. Du coup, dans l'étude de l'IPP (chiffres 2016), les 370 familles n'étaient taxées, au titre de l'ISF, qu'aux alentours de 0,3 % de leur patrimoine !

Il peut se traduire par des plus-values ou des dividendes, mais tant que ceux-ci restent dans votre holding familial, ils ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu...

Encore heureux, il manquerait plus qu'on impose les gens sur de l'argent qui ne participe pas à leur train de vie.

0,0001%... On a l'impression qu'on va toujours chercher la plus petite portion de la population pour affirmer qu'on ne paye pas assez d'impôts. Mais à ce niveau là ce n'est qu'un bruit statistique, c'est insignifiant.

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Guiskke
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1 mai 2023 à 20:02:32
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