Matrice, aliénation et hyperréalité

J'ai décidé de ressuciter ce topic après la demande de kheys nostalgiques des dissertations ésotériques de l'Elite. Bonne lecture

Bonsoir, [PAVE CESAR]
Ce topic va parler de notre aliénation et de notre addiction toujours plus poussée aux outils technologiques intrinsèquement liée à notre addiction aux réseaux sociaux.

D'abord le constat, les temps d'écran de l'humanité ont littéralement explosé. En moyenne un jeune de 15-25 ans passe en 2021, 7 heures devant un écran. Cela concerne aussi les autres générations à des degrés variables mais la tendance est à l'augmentation toujours accrue de ce temps d'écran. On va tout de suite balayer une maigre tentative de se rassurer qui va comparer la télévision au PC et au smartphone, on a tous le souvenir de cet oncle ou grand-père retraité qui passe sa journée devant la télé certes. Mais regarder un film, un programme télé, une fiction, etc. n'est en rien comparable à l'engagement cérébral et émotionnel lors de l'utilisation des réseaux sociaux. De plus, la télé et même l'ordinateur dans une moindre mesure, ça fait un bout de temps que ça existe et les temps d'écran n'ont pas augmenté aussi vite que ce à quoi nous assistons aujourd'hui. Il y a un coupable identifié le diable des réseaux sociaux qui passe par le démon du smartphone.

Ainsi, ma deuxième partie s'attaque aux causes de cette grande dépossession du temps humain par Big Tech. Je pourrais revenir sur les algorithmes calculés pour garder l'utilisateur le plus longtemps possible, la manière dont ils exploitent les affects les plus bas pour saisir par les émotions et les désirs les plus animaux le temps d'attention des hommes (allez voir les shorts qui font le plus de vues sur youtube, toujours un beau regard ou une paire de nichons) ou encore comment plus vous passez de temps sur le réseau, plus vous leur faites gagner de l'argent mais j'aimerai plutôt prendre un point de vue plus philosophique. Le monde extérieur est rude et terrible. Si vous ne travaillez pas, vous crevez à la rue à faire la manche (bien sûr si vous n'avez pas de famille sur qui compter). Il n'y a aucun moyen de fuir l'exploitation de votre force de travail 8h par jour, 5 jours par semaine. L'explosion du temps d'écran s'explique par la capacité d'utiliser son écran même au travail pour accéder à cette fenêtre hyperréelle à un monde de rêves, celui de vos rêves. Pourquoi faire des efforts ou tenter de réfléchir par soi-même? Une recherche sur google et on croit avoir une réponse objective à une question qu'on se pose.

Le mot hyperréalité n'a rien de fortuit, les réseaux sociaux ne se situent pas en dehors du réel dans le champ virtuel mais ils se superposent à la réalité. Exemple: Discuter avec vos amis bien réels avec, y lire les actualités, pouvoir aller en prison pour cause de harcèlement en ligne, etc. Je vous invite grandement si vous voulez approfondir ce concept à vous intéresser à la philosophie de Jean Baudrillard surtout son essai Simulacres et Simulation qui a inspiré le film Matrix (rien que ça, on voit Néo cacher ses CD piratés dedans dans le film)
Il n'y a pas eu de libre choix d'adopter ces outils, ils se sont imposés à nous par nos conditions matérielles et nous ont imposés leur règne. Un règne qui va jusqu'à déliter et trahir ce pour quoi ils étaient créés, lier les gens entre eux.

Les conséquences. Cette partie est la plus sombre et la plus pessimiste. Après avoir analysé pourquoi l'augmentation du temps d'écran est une tendance implacable dont nous ne sommes encore qu'au début, nous verrons quelles retombées il y a dans la transformation de l'homme animal social, en animal parasocial. En effet, le confort des réseaux sociaux et la sécurité qu'ils octroient permettent une communication sans efforts. Cela va au point que des couples s'y forment, des "amitiés" en ligne se créent et tout peut être fait par le smartphone (hormis le travail mais ça sera le sujet d'un autre topic, remarquez comment les gens parlent très rarement de leur travail sur les réseaux alors que c'est le cœur de nos vies). Cela a conduit à une destruction en règle des liens sociaux traditionnels par une logique de quantité plutôt que de qualité. Plutôt que garder 3 amis fidèles pour toute la vie, on cherche à avoir le plus grand nombre d'abonnés. Cette destruction s'illustre aussi dans l'explosion des troubles anxieux chez les jeunes et les adolescents qui préfèrent l'hyperréel au réel devenu trop inconfortable ou fade.
Et qui dit jeunes qui se côtoient moins dit jeunes qui ne baisent plus, cela est illustré par l'émergence des Incels et le recul de l'âge du premier rapport sexuel. Pour reprendre une idée d'un maître du logos, on nous met du cul partout par la pornographie mais on a jamais touché aussi peu de culs dans la vraie vie. Lisez Misères du désir de lui pour approfondir ça, le monsieur a déjà tout dit sur le sujet.
Autre conséquence que je trouve encore plus grave, c'est le règne du faux et du mytho. De base, les instincts narcissiques que cultivent les réseaux sociaux font qu'on souhaite s'y montrer sous son meilleur jour (ce forum est la seule exception à la règle). Entre filtres sur des photos, story sur le seul moment où je suis sorti alors que j'ai passé la journée en étoile de mer sur mon lit, photoshop, escrocs et arnaqueurs en ligne de tout type, influenceurs qui s'inventent des vies, fake news etc. on sait tous que les réseaux sociaux ont consacré le mensonge comme routine normalisée. Prenons la discipline du bodybuilding qui a connu une popularisation extrême concomitante à la sanctification du narcissisme sur les RS. Ce sport individuel, anti-collectif et bon reflet de la société parasociale (paragraphe précédent) est d'une inutilité fonctionnelle totale pour un athlète. Un coureur est gêné par une trop forte masse musculaire, tu vois les physiques des mecs qui font du MMA, du basket, du foot, etc. ils sont certes musclés mais beaucoup moins que l'influenceur muscu car ils sont dans le fonctionnel. Ils privilégient travailler des automatismes, la coordination musculaire, la virtuosité technique plutôt que bêtement gonfler leurs muscles. Le bodybuilder ne se muscle que par instinct narcissique et est la représentation parfaite du faux sportif. Un sportif d'apparence mais de fond du tout.
NB: je ne chie pas sur les gens qui font de la musculation, c'est positif bien sûr de s'occuper de son corps. Je décris simplement les mécanismes qui ont poussé à la popularité d'une activité pourtant marginale. Insta et muscu ça va ensemble pour faire simple.

En brouillant à ce point la limite entre vrai et faux, entre réel et imaginaire, tout en nous assénant un flux d'informations constant et ultra-rapide, on ne sait plus en tant que société et en tant qu'individu déterminer ce qui est vrai ou ce qui est faux. La période Covid illustre bien cette cacophonie, où des théories de tout type avaient émergé quand on savait encore rien du virus.

Ce que n'a pas compris Zuckerberg pionnier et premier bâtisseur de notre prison numérique, c'est que le Metaverse existe déjà et il est dans nos mornes existences vidées du risque, étripées de la liberté au profit du confort.

Bravo si vous avez tout lu, vous n'êtes pas encore complètement un zombie.
Si vous voulez une solution, elle est très simple. Sevrez-vous du numérique. Mais elle n'est pas facile, tout le système joue contre ce sevrage.

"Elle est une réalité qu'on superpose à ton regard pour t'éloigner de la verité"

Une réalité qui est fabriquée de toute pièce et qui suivrait un agenda bien précis