Francis Temperville n'avait pas beaucoup de copains au Commissariat à l'énergie atomique (CEA). Il s'en est rendu compte, hier, devant la cour d'assises de Paris, où il a vu défiler, un à un, ses anciens collègues et supérieurs hiérarchiques. Des matheux très inspirés pour la plupart. Pour commencer, Jean-Claude Nimal, son ancien directeur de thèse, a juré qu'il n'avait en aucun cas parrainé la candidature de Temperville au CEA. «Il était un peu différent de nous», dit-il. Un peu à côté de «la maison CEA». «Pas très bien habillé», ajoute-t-il, sans s'apercevoir qu'il est lui-même en tenue de pêche. C'est drôle: Nimal ne se souvient plus des félicitations obtenues par Temperville pour sa thèse. Il se rappelle de la deuxième partie, qui était «médiocre». Philippe Béatrix, l'un des patrons du recrutement, affiche le même dédain: Temperville était un «personnage assez singulier», «une mise assez paysanne, populaire, peuple quoi», «peu sensible aux codes vestimentaires sociaux», précise-t-il, dans son costume élimé. A l'en croire, Temperville n'était pas une recrue de premier choix: «Thésard à 30 ans, ce n'était pas très brillant.» Il l'a pourtant engagé. Il n'y a vu que du feu. Il n'a pas deviné l'antimilitarisme de Temperville, ni ses contacts nocturnes avec Serge et René, les deux espions russes.
Il pense que Temperville n'avait pas de petite amie. Il dit que Temperville n'était «pas très intéressé par son travail». Il quitte l'audience l'air satisfait.