"Dis-moi Célestin, d'où vient la GUERRE ?" "Et comment s'en libérer ?"
- Dis-moi Célestin, d'où vient la guerre ? Et comment s'en libérer ?
- Euh... Ah c'est un sujet qui t'intéresses, Je.. Jennifer ?
- Oui c'est un sujet majeur dans l'Histoire humaine.
- À force de te voir rester tout seul à la bibliothèque et sur ton ordi, je me suis dit que tu a dû accumuler des tant de connaissances intéressantes. Bryan et Adrien me casse les couilles avec leurs discussions de Golems, enfin tu me comprends toi ?
- Ahah oui je comprends parfaitement. D'ailleurs, c'est un sujet que je potasse en ce moment, ça tombe bien.
- Alors... Once Upon A Time...
- Aha non je rigole.
- Mais tu souhaites vraiment que j'exprime ce que je penses sur le sujet ? Là maintenant, dans la cour ?
- Parfaitement *s'assied en croisant les jambes, puis fixe Célestin*
- Bon reprenons. Assied toi bien, on est là pour quelques temps
la guerre est gravée en nous, inscrite dans notre ADN.
D’après des études zoologiques, nos plus proches cousins, les chimpanzés, ont eux aussi, cette propension à se battre pour des ressources ou des territoires, ainsi, on observe bien plus de morts des suites d'affrontements dans les populations de chimpanzés que dans les populations de bonobos.
on en conclus aisément qu’a un stade de son évolution, notre espèce a acquis ce réflexe guerrier. On ne peut que spéculer quand aux circonstances qui on engendré cette adaptation.
- J'y pense.. Tu sais, je suis très brouillon dans mes pensées... De plus, il est impossible de cerner ce vaste sujet en quelques dizaines de minutes... Il faudra se contenter de quelques aphorismes et développements épars, je pense.
- Rhôô ça va, c'est pas grave. Célestin, je sais qu'avec toi, ça sera toujours intéressant et que j'en sortirai grandie.
- Commençons par le début : il n'y a pas de guerre au Paléolithique.
- Quoi ? N'imp. Je suis sûr ils se battaient les hommes préhistoriques.
- Et bien ils pouvaient faire preuve de violence, oui (meurtres, certes rares, pouvaient apparaitre au sein de la tribu), mais la guerre n'existait pas. La guerre surgit seulement au Néolithique avec l'apparition de l'agriculture, des stocks agraires, l'appropriation, la division du travail, l'échange... etc.
Des cas de violences collectives (sorte de guerre) sont recensées sur le site de Nataruk au Kenya, et aussi celui de Jebel Sahaba vers le Nil. Ce sont les deux plus anciens cas recensés qui apparaissent dans le Mésolithique (phase de transition entre le Paléolithique et le Néolithique). Ils font quelques dizaine de morts. Il n'y a pas de cas recensés dans le Paléolithique profond (comme le constate la préhistorienne Marylène Patou-Mathis)
- Quoi ? Mais en quoi le passage au Néolithique fait naître ses tensions ?
- La guerre naîtra réellement au Néolithique avec l'apparition de l'agriculture, donc des stocks agraires. Ces derniers seront convoités par les tribus adverses. L'agriculture engendre aussi des bouleversements sociaux inédits sur lesquels je ne peux m'attarder davantage.
- Ce qu'il faut retenir Jenny, c'est que l'acte de guerre n'est pas consubstantielle à l'être humain, mais dépend de la Politique lorsque l'homme bascule dans le temps néolithique qui devient le temps de l'appropriation.
D'ailleurs les premières guerres se terminent par la mise en esclavage des personnes de la tribu vaincue. Ils garderont les troupeaux, récolteront les moissons etc. Alors qu'au temps paléolithique, un esclave n'aurait servi à rien, puisqu'il n'y a pas de travail. Mais je suis pas encore certain de ce que j'avance
- T'es super optimiste en fait Céles', contrairement au prof qui dit que la guerre est inscrite dans les gênes de l'Homme, ou comme T. Hobbes qui affirmait que l'Homme est un loup pour l'homme.
- Bref. Je ne vais pas accuser les politiciens d'être la cause des guerres. Si la guerre n'est que la continuation de la politique par d’autres moyens (comme disait Clausewitz), elle
n'est que l'expression des intérêts économiques des classes dominantes.
- Tu rigoles ? C'est eux qui déclarent les guerres.
- Par exemple, il est facile de concevoir pourquoi les esclavagistes romains faisaient la guerre.
Les esclaves étaient la richesse sociale essentielle du mode de production esclavagiste antique et ne pouvaient être conquis que les armes à la main.
- Ensuite, il est facile de comprendre pourquoi les seigneurs faisaient la guerre. La terre de ses habitants étaient la richesse sociale par excellence, le le plus honorable moyen d'acquérir sur cet ensemble ce qu'on appelait les droits féodaux, c'était de s’en emparer à la force du poignet et il est à peine plus difficile de saisir le pourquoi des guerres napoléoniennes. La bourgeoise française, réalisant son hégémonie politique, s'érigeant en nation capitaliste des marchands et des manufacturiers, avait à briser le bloc du capitalisme anglais et de la réaction féodale austro-russe.
- Waouh, ça me paraît limpide maintenant, vas-y continue Céles
- Mais en effet, pour revenir à ce que tu disais, la guerre n'est pas intrinsèque à l'Homme. La guerre naît avec l'Histoire, c'est à dire la civilisation. Elle naît dans un contexte, qui est l'économie de production.
- Oui la guerre ne fait pas partie de la nature humaine, en quelque sorte. D'ailleurs c'est un mythe qui a longtemps circulé pour valoriser la civilisation face à la "barbarie" des "sauvages".
- Oui, l'asservissement, la soumission de l'autre, ne sont pas pas innés.
- C'est plutôt une bonne nouvelle, mais au fond de moi, je le savais déjà. J'en avais l'intuition.
- Tout n'est pas idyllique non plus au Paléolithique mais les seuls cas de violence que l'on peut recenser au Paléolithique profond sont des cas d'accidents de chasse, de cannibalisme (individus déjà morts) ou de meurtres périphériques.
- Bref, passons aux choses sérieuses et sautons dans le temps.
- En période de domination formelle du Capital, c'est à dire avant 1914...
- Ah oui et bien : on peut positionner le capitalisme en deux temps chronologiques. L'un de ces temps est nommé phase "formelle", du XIIIe siècle jusqu'à 1914. Et l'autre à partir de 1914 jusqu'à aujourd'hui : la phase "réelle". La phase formelle est une période où le Capital n'est pas encore lui-même, il s'appuie sur des béquilles du temps d'avant, tandis qu'à partir de 1914, il devient pleinement lui-même.
- Faudrait que tu lises Marx et Cousin pour comprendre
- Je disais, en domination formelle du Capital, c'est à dire avant 1914, on engage le surplus de la métropole dans des territoires extra-capitalistes au dehors ( c'est la colonisation). Le Capital résout sa crise en colonisant. Mais à partir de 1914, toute la planète est colonisée d'un point de vue spatial (exemple de la conférence de Berlin en 1883-84 où l'Europe se partage l'Afrique), l'on ne peut plus coloniser.
Alors les nations capitalistes sont obligées de s'entredétruire, de détruire le surplus de production pour finir par un repartage des marchés : c'est la naissance de la Première Guerre mondiale en 1914. Le capitalisme anglais doit détruire l'industrie allemande. On passe du colonialisme à l'impérialisme.
- Liquidation de la surproduction ? Quoi ? Tu vas trop vite je suis perdue là
- Les deux guerres mondiales surgissent pour liquider la surproduction capitaliste (matérielle comme humaine...).
- La guerre est la solution capitaliste de la crise.
- Pourtant la guerre fait perdre beaucoup d'argent aux capitalistes ? Je pige pas.
- Oui mais on s'en fiche, car c'est le principe de "s'amputer pour mieux se sauver" : le Capital n'a pas le choix. C'est pas un hasard si les Trente Glorieuses arrivent après la boucherie de 1939-45.
Pour saisir il faudrait comprendre la baisse tendancielle du taux de profit, loi découverte par Marx... Mais bon, passons.
- Lorsque le Capital passe en économie de guerre, en transformant ses forces de production en forces de destruction, c'est pour liquider son hubris de surproduction et repartir sur des bases moins crisiques à un niveau du taux de profit moins critique et pour que persiste le cycle de l'exploitation humaine.
- La guerre est le dernier recours du Capital lorsqu'il n'y a plus de débouchés solvables dans un marché ultra-saturé. Depuis 1914, le monde entier est colonisé et les marchés saturés. À partir de là, les capitalistes sont condamnés à s'auto-détruire afin de repartager militairement les marchés. La guerre n'est finalement que le stade final de la concurrence commerciale...
- Je vois. Le commerce, qui correspond à la phase de "paix" mène en réalité toujours.. à la guerre.
- Oui ! Il est donc inutile de supplier l'État pour "sauver la paix" ou "arrêter la course aux armements" puisque c'est une nécessité capitaliste. Seul le prolétariat révolutionnaire peut arrêter la guerre car il est le seul à pouvoir briser à la source les mécanismes du profit capitaliste (qui conduisent toujours à la guerre).
- La guerre capitaliste, c'est le moyen pour les capitalistes de faire s'entre-massacrer les prolétaires et de leur faire détruire les moyens de production jusqu'à ce que soient éliminés les usines et les ouvriers qui, pour l’ordre capitaliste, sont en surnombre.
- Quand le chômage augmente, que le pouvoir d'achat s'épuise, quand les stocks s'accumulent, quand les machines les plus modernes s'usent à ne rien faire ne reste-il pas l'ultime ressource de tuer les ouvriers de la nation voisine ? De lui arracher des indemnités de guerre, de lui brûler ses stocks, de lui briser ses machines, et ainsi de se donner un peu de champ en faisant autour de soi le désert ?
Il n'y a qu'une solution : celle de la destruction d’une partie des forces de production pour assurer à l'autre quelque répit.
- Détruire et gaspiller, voilà la fonction de la guerre dans la période réelle du capitalisme.
- Lors de la crise du Capital, les capitalistes n'ont qu'une solution à proposer : « Prolétaires de tous les pays, égorgez-vous » !
- C'est dur à avaler... C'est pas le prof d'histoire M. Trizot qui allait m'apprendre ça. Le Capital est vraiment le cœur du problème.
Données du topic
- Auteur
- COUSINED--_
- Date de création
- 19 août 2022 à 18:47:57
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