"Université raciste, chercheurs bourgeois on vous voit", "1 blanc, 1 balle", "brûlons le TGI", "Charlie l'a mérité", "les prisons en feu, les matons au milieu", "youpin décolonial", "nik les cis", "stop les sciences coloniales"... Sur les sept étages du bâtiment de l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), installée sur le campus Condorcet à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), des tags en lettres rouges ou noires délivrent des messages souvent rageurs et haineux, parfois contradictoires ou nébuleux. "Nous sommes en train de les recenser et de les photographier pour en faire un objet d'étude", expliquait la direction juste après l'occupation des lieux, du 20 au 23 avril dernier. Dans un document interne, on déplore les portes défoncées, les casiers forcés, le matériel informatique volé et un coût financier qui se chiffrerait à plusieurs centaines de milliers d'euros. D'après Christophe Prochasson, le président de l'école, deux cocktails Molotov - ne contenant aucun liquide - ont également été retrouvés sur le toit du bâtiment. Un mois plus tard, au sein de l'établissement, la même question revient, taraudante : comment en est-on arrivé là ? Ces actes de vandalisme interviennent à un moment où l'éminente institution, longtemps considérée comme le saint des saints des sciences sociales, connaît des difficultés sans précédent. Tourmentée par une sourde rivalité entre étudiants en master et doctorants, rongée par une bataille idéologique virulente, l'EHESS est entrée en crise.