À l'époque, en 1983, je sortais en boîte avec mon ami homosexuel Vincent Dieutre, un cinéaste un peu connu. J'étais au bar avec lui. Il était habillé comme l'homosexuel chic qu'il était, et il était identifiable comme gay. C'était mon copain, j'étais le jeune dragueur hétéro et lui c'était mon pote homo.
Et là, Johnny arrive au bar, il était bourré, parce que c'était un alcoolique invétéré. Il défait le noeud papillon de mon ami Vincent Dieutre, qu'il avait donc identifié comme gay. On est bien dans la vieille tradition du loubard qui casse du pédé. C'était l'époque.
Je m'interpose et je dis à Johnny "fait pas chier. "
À l'époque je faisais de la boxe française trois fois par semaine, j'étais en forme, j'étais bien musclé. Au moment où je dis ça à Johnny, je vois immédiatement ses dents. Il avait les dents du bas noirâtres. C'est l'image dont je me souviens parcequ'il me met un coup de boule directement. J'ai juste le temps de faire une légère esquive et je le prends dans l'épaule. Et d'instinct comme je faisais de la boxe, je lui met une droite en pleine gueule, comme il était bourré de toute façon, je le couche. Boum, il part à la renverse, et il cherche pas à se relever.
Immédiatement, un mec que je vois pas venir, car on était dans le noir, et en plus il était noir: c'était Alan, son garde du corps. Et là démarre la baston. Il me rentre dedans, je bloque les coups, pour pas prendre directement dans la face. C'était pas un spécialiste et il travaillait un peu large car il avait pas de technique. Ça me faisait des oeufs de pigeon un peu partout, mais rien dans la face. J'attends qu'il finisse sa série et qu'il se vide. Au moment où il a fini j'ai contre-attaqué, je l'ai séché d'un chassé médian à l'estomac.
Mais la bagarre a duré un moment, on a fait des bonds et je me souviens m'être retrouvé sur les genoux de Jane Birkin et Gainsbourg, qui à l'époque occupaient la table ronde en bas, pour ceux qui s'en souviennent.
Puis là, les videurs arrivent. Je me disais "je vais me faire défoncer par les videurs" ma vraie angoisse c'était ça, pas Johnny ou son garde du corps.
Et donc, les videurs m'emmènent au coin du bar, et ils m'offrent un jus d'orange et ils me disent "tu as bien fait. Ce connard de Johnny est là tous les soirs bourré."
Et là, le Alan, le garde du corps avec qui je me suis battu, est venu vers moi, m'a serré la main et il m'a dit "Tu t'es bien battu, mais FAUT PAS TOUCHER JOHNNY. "
Et donc c'est un très bon souvenir finalement. Et je peux me vanter devant vous: je fais parti des types qui se sont battus avec Johnny et qui l'ont couché d'une droite.