[PAVE] CÉLESTIN tu nous présentes LÉA ?
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"Hein euuuuuuh quoi quoi ? Ah merde... c'est l'heure... 8h20... les cours"
Toujours seul, toujours puceau, toujours triste, personne à côté de moi dans ce petit lit. Je me réveille difficilement et j'allume la lumière dans ma chambre CROUS en bordel et puant le sperme.
Je vire ma couette, assit sur le côté gauche du lit je me lève puis j'enfile un boxer lidl et mon jogging, je vais dans mon coin cuisine pour manger vite fait. Dehors il fait froid. Je vois ces abrutis de papillons de nuit attirés par la lumière, se poser sur les fenêtres. Ils sont vraiment cons ces insectes.
Je tremble à cause de la fatigue et de la fraîcheur de l'air, je me verse un café de la veille, je le passe au micro onde vite fait et je l'avale en 3 gorgées. Je mange 2 tranches de brioche et je vais dans la salle de bain.
Je me brosse les dents, il est 8h40, je me lave le visage mais avant ça je m'observe. J'observe ma gueule dépitée de puceau tardif étudiant jour et nuit. Je suis cerné, calvitié, j'ai aussi des marques rouges de la veille dues à de l'acné et à un rasage trop agressif.
Je soupire et j'ai une grosse pression dans ma poitrine. Bon je taille.
Évidemment je n'oublie pas mon sac de cours. A l'école tout le monde a un sac, souvent un sac kipsta éclaté ou un décathlon pas cher, à l'intérieur on y met le repas, dans une boîte en plastique souvent. Je prépare le mien la veille, j'y mets toujours la même chose : un jambon beurre éco+, un sachet de chips Lidl, une brioche aux pépites de chocolat noir maître Jean-Pierre (cimer chef), une banane, une pomme. Quand je suis à l'usine j'ai tout le temps faim.
8h50 il est l'heure que j'y aille. Habitant dans le nord, il fait toujours moins de 15°C le matin et j'ai donc froid, j'ai froid dehors, j'ai froid en attendant mon tram. Ce matin il a un retard de 5 minutes, comme hier. Je vois le monde qui attend à mon arrêt, de quoi remplir un tram vide.
Il est là, complètement remplit. J'essaie de rentrer. L'odeur est insoutenable, je passe mon trajet sous les aisselles d'un groupe de wesh avec une senteur très marquée.
Le tram s'arrête enfin à mon arrêt. Je retrouve enfin de l'air respirable, et le froid matinal. Je ne marche ni vite ni lentement, je n'ai pas enfin d'aller en classe, mais je suis en retard.
Une fois arrivé à l'école je passe la porte d'entrée en baissant la tête face au groupe de fumeurs toujours entourés de meufs, comme à mon habitude. Étudiant dans l'architecture, je dois d'abord passer à la repro. Je me dirige vers le local, où plein de monde fait la queue. La plupart parle de la soirée de la veille, celle dont je n'avais pas eu vent. Après 5 minutes d'attente, j'ai un pc pour imprimer, évidemment celui qui ne fonctionne pas bien. J'appelle le fonctionnaire sensé gérer les ordis de la repro. Après l'avoir appelé 5 fois, il consent finalement à se lever pour exécuter son seul acte de travail de la journée. De sa face de croque-mort, il me répond que l'ordi fonctionne très bien, il faut juste attendre. Il lance finalement une impression. Évidemment elle n'est ni au bon format, ni en couleur. Mon rendu est grotesque
C'est pas grave, je suis en retard. Je reprends mon gros sac avec tout mon matos, inconfortable au possible et qui défonce le dos. J'arrive devant la salle de classe, j'entre. L'enfer commence. Le prof me demande pourquoi j'ai 10 minutes de retard. Et pourquoi mon rendu n'est pas dans le format attendu.
Personne ne dit bonjour. On s'en branle on veut juste que les 8 heures d'enfer se terminent le plus rapidement.
Souvent la journée se passe normalement, j'attends que le temps passe à écouter les leçons de morale sur l'écologie et que l'occident est le poison du monde, des fois c'est la merde et les profs m'expliquent que j'ai rien à foutre là et que je devrais mieux serrer les boulons à l'usine.
Si je devais résumer mes journées ce serait : passer ses journées à écouter des profs et des conférences chiantes pour te dégoûter de ta passion, qui sont des odes à l'ethnomasochisme et à la décroissance, en expliquant bien que l'avenir du futur architecture n'est pas de proposer d'ambitieux bâtiment ou inscrire l'élégance sur les façades des villes, mais de faire des logements sociaux austères et froids, et/ou des espèces de cabanes en bois immondes pour écolo. Le reste du temps il s'agit de présenter son travail qui sera moqué et critiqué. Pendant 8h. Pour gagner quoi ?
Le tout dans une ambiance communiste ostile à la moindre remise en question. C'est chiant et aliénant, voyant que je ne suis pas de cette mouvance décroissante crado, personne ne parle, personne ne veut m'approcher. Ou bien c'est pour d'autres raisons.
De toute façon de quoi parler et avec qui ? On parle souvent de la boucle sur ce forum mais la plus grosse boucle c'est les études et de loin. Entre les profs qui cherchent une reconnaissance à travers le gauchisme et les élèves qui ont les neurones grillés par les drogues. Ils ont un grain. Ils n'ont tous qu'un seul sujet de conversation : le projet, la matière la plus importante. Le reste ne parle que d'écologie, de décroissance, c'est une religion, un dogme, pour tiers-mondiser l'occident. Ça s'arrête la. Des fois on rencontre des gens intéressants et assez malins, on se demande comment ils peuvent rester ici, dans ce merdier.
Les pires sont ceux qui ne parlent QUE du boulot et du projet, c'est très commun, leur vie tourne autour du projet, ils ne sortent qu'avec des gens de l'école, pour parler projet, ils envoient des messages à 2h du mat' sur ça, veulent faire des visio tous les deux jours pour bien faire chier. Faites une croix sur votre vie si vous bosser avec eux.
Si on a le malheur de les rencontrer en dehors des cours, ils parleront des séances à venir, des maquettes à faire, des partiels, des voeux pour le prochain semestre, des erreurs commises par tel ou tel autre étudiant, de la COP26, du jour du dépassement, etc (des remarques qui ne viennent pas d'eux mais qu'ils répètent sans cesse et de jours en jours). En demandant l'interminable question "Au fait pourquoi t'es ici au lieu de bosser toi ? Faut pas flâner, le projet n'attend pas.".
Du coup j'attends la pause, et je pense. Je pense énormément car c'est la seule chose à faire. Je pense à Karl Marx et au surtravail, je pense aux millions de jeunes qui n'ont pas la chance de faire des études, je me dis que c'est pas si mal ici finalement.
Puis je pense à mes collègues du lycée, certains sont traders, d'autres influenceurs, d'autres ont monté leur business et gagnent leur vie, et je me dis que je devrais en finir. Moi je ne gagne rien, je dois supporter un cauchemar soviétique chaque jour. Je pense à une mec en particulier qui est en 5e année d'HEC, qui voyage partout dans les grandes capitales, loin des idéologies décroissantes et ethnomasochistes. La question du déterminisme m'obsède et me terrifie. Et si j'avais fait si, si à ce moment là j'avais fait ça est ce que j'aurais pu ...? Souvent je me dis, non. Trop pauvre, trop moche, trop faible, trop con, trop prolo (mais pas assez pour une bourse, pays communiste injuste).
J'aurais pu lancer les dés 100 fois de suite j'aurais tout de même fini entouré de gauchiste, sans avenir brillant devant moi, et il aurait toujours finie trader et toujours entouré d'amis et de femmes 9/10.
12h47, pause déjeuné malgré les 17 minutes de retard. Mon poids a tendance à chuter dangereusement depuis que je suis à l'ENSA, alors je mange beaucoup contrairement à certains, mes tupperwares sont pleins. Je me tape souvent des regards froids de tous ces bobos vegans et écolos qui voient en mon repas "une oppression de l'homme blanc sur la nature et la planète". Pour d'autres seul la quantité gêne, je les vois penser "mais il se croit tout permis lui, quand d'autres meurent de fin". On m'a déjà dit "je préfère pas t'avoir en pension toi". Je mange vite, je suis crevé, j'ai envie d'hurler et de pleurer. J'ai envie d'attraper mon voisin par le col, de le secouer et de lui dire "Pourquoi on est la ? Pourquoi on subit ça ??? C'est donc ÇA notre existence ?". Malheureusement c'est un gauchiste au cheveux longs plongé sur son pc apple, il est très heureux ici comme parasite profitant des bourses de notre pays socialiste pour s'acheter des joints.
Retour en cours, rien de nouveau rien de surprenant, un prof nous explique que le nucléaire est un mal absolu, pauvre France, les obscurantistes anti nucléaire ont pignon sur rue. Vivement 17h30 que je me casse.
18h00, le prof n'a pas fini ses explications, les autres l'écoutent religieusement.
Une fois l'heure arrivée je taille, passant pour un mauvais élève qui en a rien à foutre de leur cours. Dehors, il fait nuit. Je n'ai pas vu le soleil de la journée.
J'arrive chez moi, c'est là que le gros du travail commence. Je dois terminer d'avance sur la modélisation 3D pour demain 8h. Mais je dois aussi rendre l'avancement de mon mémoire au plus vite.
Je regarde mes messages : 21 nouveaux messages sur l'avancement du projet à rendre dans 5 jours.
Je n'ai qu'une envie c'est de mourir sur mon canapé et c'est ce que je fais souvent, du moins jusqu'à 21h-22h. Des fois je vais faire les courses, épuisé, le reste du temps je reste chez moi. Je suis trop crevé pour go muscu, je ne connais personne et n'ai personne dans ma vie.
Je fini par manger à 23h, puis me décider à bosser, jusqu'à 4h ou 5h du matin.
Le week end est identique à la semaine sauf que je suis moins fatigué.
Et tout ça pour quoi ? Aucune reconnaissance, mais ça on s'en fout, je ne gagne rien, même je m'appauvris au fil de temps, entre les courses, le matos, etc.
Je ne gagne rien, pas même une bourse et je n'ai pas la foi de faire toutes les démarches pour les APL.
Quand je pense à tous les parasites qui ne vivent que des aides. Et que le jour où je travaillerai, la moitié de mon salaire ira pour des gens inactifs arrivés en France depuis 6 mois, ou des étudiants gauchistes pour s'acheter des macs.
Sous ma couette durant mes 3-4 pauvres heures de sommeil, je rêve d'une autre vie ou d'un cataclysme nucléaire vaporisant toute forme d'existence sur Terre, puis je culpabilise, me disant que les autres n'ont pas une vie aussi merdique et méritent davantage de vivre que moi.
C'est ainsi que se poursuit ma vie, plate et sans saveur, aliénante, frustrante et déprimante. C'est ainsi que fonctionne l'enseignement supérieur.
Demain ce sera pire.
Chienne de vie.
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Données du topic
- Auteur
- LibegonPfizer
- Date de création
- 13 novembre 2021 à 19:38:49
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