Il est vrai qu’à un certain point de vue, notre présent ressemble aux années 1930.
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Les idéologies de cette époque peuvent être enfermées dans un seul mot : l’hyperpolitisation, caractéristique des idéologies totalitaires.
Nous sommes, nous, dans un contexte de dépolitisation, et à certains égards de dépolitisation radicale. Et bien loin d’être dans une phase de mobilisation des masses, nous sommes dans une phase de privatisation des individus.
Les années 1930 étaient l’ère des masses, le moment de l’entrée des foules dans l’action politique ; c’est sur elles qu’on comptait – en fonction de l’axiome : « Ce sont les masses qui font l’Histoire ».
Quant à nous, la partie proprement idéologique qui nous intéresse concerne essentiellement les élites, dont c’est d’ailleurs un élément de coupure avec les peuples. Autrefois, l’avant-garde consciente devait entraîner les masses ; aujourd’hui les masses sont hors du coup, elles regardent la télévision ! L’idéologie concerne les superdiplômés, même si elle diffuse dans toute la société.
Au centre des projets totalitaires, il y avait un grand objectif, qui était de maîtriser l’économie par le politique, avec une version d’extrême gauche contre une version d’extrême droite, mais dans les deux cas cette maîtrise politique constituait le cœur de la visée totalitaire.
Nous sommes, à l’opposé, dans une expérience qui vise fondamentalement à la liquidation du politique au profit de l’économique : il s’agit aujourd’hui de libérer au maximum l’économie de la régulation politique, considérée comme une entrave à sa bonne marche.
. Plus profondément encore, dans l’imaginaire des projets totalitaires qui dominaient les années 1930, l’objectif était de reconstruire l’unité du peuple contre les divisions qui s’étaient développées dans la société depuis l’émergence du capitalisme…
Du capitalisme ou de la démocratie ?
Du capitalisme et de la démocratie. Le capitalisme oppose les patrons et les prolétaires, la démocratie parlementaire oppose les opinions, en libérant des antagonismes vus comme destructeurs par les adeptes des totalitarismes. Leur aspiration est de retrouver une unanimité des esprits par la doctrine que le parti qui encadre les masses est capable de proposer.
Nous sommes aujourd’hui à l’opposé : moins il y a de doctrine, mieux on se porte.
Tout ce qui représente une adhésion idéologique paraît hors de mise, tandis qu’est valorisée par-dessus tout l’indépendance des individus. D’où une frappante marginalisation des thèmes de « classes » ou de « nations ».
Tout ce qui représente par rapport aux individus une appartenance de rang supérieur, ou un encadrement collectif, est récusé au profit d’une déliaison des personnes aussi étendue que possible. L’englobement collectif a disparu.
À tous égards, donc, le climat intellectuel se présente aujourd’hui comme le parfait inverse de celui qui prévalait dans les années 1930. Au point que cette symétrie dans l’opposition a quelque chose de mystérieux.
Dans la configuration des années 1930, par leur participation parfois active à la mobilisation, leur part d’adhésion à la naissance des projets totalitaires, les individus pouvaient donner le sentiment de chercher eux-mêmes à retrouver l’unité perdue par la division capitaliste ou démocratique. Dans la configuration actuelle, peut-on dire que les individus sont acteurs de la déliaison sociale et de l’anomie ? La souhaitent-ils ?
Oui, la symétrie va jusque-là.
Mais attention : nous parlons de l’idéologie, pas de la réalité.
Du point de vue des discours, les individus ne peuvent que souhaiter leur réalisation personnelle la plus complète possible, c’est leur horizon existentiel. Donc la plus complète indépendance vis-à-vis des autres et de leur société correspond à leurs aspirations les plus profondes.
La symétrie va jusque-là, et elle est intéressante à faire ressortir pour marquer la radicalité de ce monde sans radicalité apparente ; car, encore une fois, il y a une vraie radicalité dans le monde où nous sommes, même si elle est d’un genre tout différent de celle d’autrefois, et il faut comprendre pourquoi.
Mais alors n’est-il pas inapproprié d’utiliser le mot « idéologie » pour la situation où nous sommes, par rapport aux définitions ordinaires du mot ? La symétrie inversée que vous établissez entre le contexte des années 1930 et la situation présente ne repose-t-elle pas sur le fait d’utiliser le même mot en lui donnant deux acceptions différentes ?
Il est vrai que le sens qu’avait le mot « idéologie » dans le moment totalitaire pourrait conduire à conclure à son absence aujourd’hui.
Le sociologue américain Daniel Bell en avait fait le constat il y a longtemps et, bien qu’apparemment démenti par la vague révolutionnaire de la fin des années 1960, il avait raison : les grandes idéologies révolutionnaires, que ce soit à l’enseigne de la nation ou du socialisme, ont perdu toute espèce d’autorité.
Apparemment, nous sommes donc sortis de l’idéologie ; tous les ingrédients qui assuraient le rayonnement de ces grandes idéologies d’extrême droite ou d’extrême gauche ont disparu.
Le projet d’une science de la société devant guider l’action politique d’un parti rassemblé autour de cette doctrine n’est plus au rendez-vous. Aucune force politique n’est là pour proposer une théorie générale de l’histoire aboutissant à un grand projet de société future.
Mais en raisonnant de la sorte, on confond idéologie révolutionnaire (ou idéologie radicale) et idéologie tout court. Les idéologies extrêmes n’ont été qu’un cas particulier des idéologies en général.
On peut dire en vérité qu’il y a une idéologie ordinaire, qui est un phénomène constitutif et indépassable des sociétés où nous vivons. Des sociétés qu’on peut appeler, pour faire ressortir la nécessité du phénomène idéologique, « sociétés de l’histoire »
Comment les définissez-vous ?
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Dans ces sociétés, l’idéologie est le discours qui prend en charge le mouvement de l’histoire pour en tirer des conclusions politiques.
Sur ce point, les sociétés de l’histoire s’opposent aux sociétés religieuses, qui définissent leur ordre en fonction d’une extériorité de leur fondement et d’une antériorité de leur tradition, autrement dit en fonction des modèles du passé.
Une société religieuse ne peut pas être une société idéologique. L’idéologie est ce qui émerge avec l’historicité, c’est-à-dire la conscience historique et la réalité d’un devenir assumé en conscience à partir du début du xixe siècle.
Ce passage à une histoire reconnue comme l’œuvre des hommes et voulue pour telle va de pair avec le gouvernement représentatif, la délibération collective, et le processus électoral.
Qui dit élection dit choix entre différentes options. Ces options s’appuient sur des idéologies, c’est-à-dire sur des explications du mouvement historique, avec les conséquences pratiques à en tirer.
Le phénomène idéologique est inséparable du pluralisme intellectuel des sociétés modernes, ce pluralisme que veulent nier les idéologies totalitaires.
Dans la société où s’installe le gouvernement représentatif, il s’agit fondamentalement de définir un rapport au passé, de déterminer les urgences du présent, et de répondre à la question : vers quoi voulons-nous et pouvons-nous aller ? Quel est l’avenir qui paraît à la fois possible et souhaitable et vers lequel doit se diriger l’action collective ?
De quand date ce fond idéologique commun aux sociétés de l’Histoire ?
Tout cela se met en place au xixe siècle et va subsister jusqu’à nous, y compris à l’époque où les totalitarismes tiennent la vedette.
Les idéologies radicales n’épuisent pas le champ intellectuel des sociétés occidentales, qui restent démocratiques et pluralistes au travers de ces vicissitudes, heureusement pour nous !
La particularité du xxe siècle aura été le surgissement dans le champ idéologique de deux pôles extrêmes à l’enseigne du nationalisme et du révolutionnarisme.
Mais il s’agit là d’un phénomène historique, cantonné à une période déterminée, en gros, celle qui va des années 1880, ou 1890, jusqu’aux années 1970 : il aura occupé un petit siècle.
Et puis cette configuration dominée par l’horizon d’une rupture radicale où, déjà, depuis 1945, la rupture ultranationaliste n’était plus tenable, s’est effacée. Nous sommes revenus à un paysage plus habituel, mais avec une nouveauté qui a accompagné le dépérissement des idéologies extrêmes : l’apparition d’un néolibéralisme.
Pourquoi « néo » ? En raison simplement de sa différence avec le libéralisme classique, celui du xixe siècle.
De manière générale, les idéologies évoluent en fonction du contenu de l’expérience historique dont elles
cherchent à rendre compte.
L’originalité du néolibéralisme tient à un changement dans la structure de nos sociétés.
La dissociation de la société civile et de l’État restant inaccomplie, la persistance de la structuration religieuse continuait de prêter à l’État une prééminence par rapport à la société qui pouvait aller jusqu’à faire rêver au rétablissement de leur ancienne unité. C’est ce croyable qu’exploitaient l’ultranationalisme ou l’ultrarévolutionnarisme.
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Mais c’est aussi bien sur lui que se fondaient le conservatisme ordinaire ou le socialisme ordinaire, le premier pour réclamer l’ordre social par l’autorité, le second pour demander la justice sociale par la gestion collective de la production et de la répartition des richesses.
Le libéralisme classique lui-même, bien qu’attaché à la liberté de la société et de ses acteurs, n’envisageait cette liberté que dans un cadre national et étatique, au service du bien de la collectivité.
La dissolution des restes de structuration religieuse a liquidé cette disposition d’ensemble. . Elle a rendu la société civile entièrement indépendante de l’État, sans plus aucune suprématie de celui-ci. Il est cette fois pour de bon à son service, sans plus aucune capacité de lui imposer son ordre d’en haut.
C’est cette transformation structurelle qui a consacré la victoire idéologique du libéralisme, en sapant simultanément les bases tant du conservatisme que du socialisme classiques. Elle les oblige à se réinventer.
Il n’y a plus d’autoritarisme conservateur possible, pas plus que d’étatisme socialiste possible
D’une certaine façon, tout le monde est devenu libéral au sens où tout le monde est contraint de prendre en compte cette donnée de la séparation de la société civile et de l’État, que les libéraux classiques ont été les premiers à défendre et à illustrer.
Les conservateurs restent conservateurs mais ils sont forcés d’être dans une certaine mesure libéraux en admettant l’indépendance de la société par rapport à l’autorité publique.
Les socialistes restent socialistes mais il leur faut s’adapter à cette existence irréductible de la société civile privée. Mais on voit aussi que les libéraux ne sont plus libéraux de la même façon et dans le même sens.
Car cette émancipation de la société peut aller jusqu’à nourrir l’idée d’une liquidation pure et simple du cadre politique comme l’idée d’une émancipation complète des intérêts individuels de tout cadre collectif.
C’est de ce côté qu’est passée la radicalité dans notre monde et les frontières entre libéralisme ordinaire et libéralisme radical sont poreuses.
En vous écoutant, on a l’impression que le socialisme est la principale victime de ce bouleversement idéologique…
Pour elle, le choc est énorme.
Le cœur du projet socialiste depuis un siècle et demi était l’appropriation collective des moyens de production de façon à faire rentrer la propriété privée au sein de la communauté politique et sociale et à retrouver ainsi l’unité de la collectivité.
C’est par excellence la perspective que le tournant récent a irrémédiablement frappée de décroyance.
Le projet ne parle plus à personne, pas même aux zélateurs les plus excités de la gauche de la gauche. Et surtout pas aux actuels dirigeants chinois, qui ont bien compris, eux, que le socialisme serait « de marché » ou ne serait pas.
À cause du bilan des expériences ?
Ce ne sont pas les leçons de l’expérience qui ont changé les choses, mais la disparition des facteurs qui conféraient une sorte d’évidence collective à la supériorité de l’instance politique et qui rendaient imaginable à partir de là une extension de l’autorité publique au domaine économique, jusqu’à son absorption complète.
Cette évidence s’appliquait aussi aux libéraux.
Et c’est sa disparition qui va faire toute la différence entre le libéralisme classique et le néolibéralisme. Les libéraux s’inscrivaient dans le cercle des présupposés dictés par la verticalité politique.
Il était entendu que les peuples élisent leurs dirigeants, d’une façon démocratique, mais il allait de soi que ces dirigeants, une fois en position de pouvoir, tout en représentant la société, étaient en position de domination vis-à-vis d’elle et en mesure d’imposer une volonté générale émanée de la collectivité à l’ensemble des activités.
Il y avait un dogme de l’autorité publique, qui paraissait dans la nature des choses.
Mais il n’était pas dans la nature des choses, il relevait d’une certaine organisation héritée du passé religieux,
et la dissipation de ces restes d’organisation religieuse a eu pour effet de faire apparaître dans toute sa rigueur le principe libéral, à savoir : l’indépendance de la société, qui est première, le pouvoir étant second et n’ayant d’autorité que subordonnée à elle.
Le pouvoir n’a plus cette fonction de surplomb autoritaire qui pouvait soutenir aussi bien l’idéal conservateur de l’ordre que l’idéal socialiste de l’organisation collective primant sur les intérêts des individus et des acteurs économiques mais qui avait également pour effet de limiter les prétentions du libéralisme.
Ce n’est plus comme cela que les choses se passent.
La nouveauté radicale, c’est la désubordination de l’économie, comme de la société en général par rapport à l’autorité publique, et c’est de cela que le néolibéralisme, allant de pair avec la globalisation, est la théorie
L’activité économique des individus est libre, dans un espace qui n’a aucune raison de se cantonner à l’espace national.
Ce qui a totalement changé, c’est le rapport du libéralisme au politique.
Celui-ci n’a plus aucune autre consistance à ses yeux qu’en tant qu’annexe ou dépendance de l’économie.
Le nouveau libéralisme – et c’est en ceci qu’il devient radical – est un discours de contestation de la possibilité, pour le politique, d’imposer quelque limite que ce soit aux initiatives économiques des acteurs et plus généralement à l’expression de leurs droits, dans un espace post-politique qui échappe à la régulation des États nationaux dans toute la mesure du possible, en dehors de ce que sont minimalement les fonctions régaliennes de protection des propriétés et des biens.
Pourquoi la structuration religieuse de nos sociétés, sous sa forme résiduelle, à l’état de traces sous-estimées dans les premiers âges de la démocratie, s’efface-t-elle définitivement à ce moment précis ? Pourquoi si vite ?
Il se situe au point de rencontre de deux phénomènes.
Il y a d’abord une érosion lente, commencée de très longue date, accélérée par la période des Trente Glorieuses. Par exemple, la montée en puissance de l’État-providence a favorisé la disparition des communautés dites « naturelles », à commencer par les familles ; tout simplement parce que l’État donne des moyens d’indépendance aux gens, qui font qu’ils n’ont plus besoin par exemple des solidarités de voisinage.
On pourrait prendre bien d’autres illustrations de cette dissipation dans différents registres, à commencer par le politique.
Et puis il y a un phénomène conjoncturel : la crise économique des années 1970, qui a été bien plus qu’une crise, une réorientation économique majeure de nos sociétés. Elle a déterminé en particulier l’extraversion des économies, faisant passer au premier plan la compétitivité économique, ce qu’on va appeler « la contrainte extérieure », la nécessité de l’exportation, de l’innovation ; la politique se concentre désormais dans cette tâche.
Auparavant, pour un de Gaulle par exemple, la tâche prioritaire était la grandeur de la France et sa défense à l’égard des menaces, tout à fait sérieuses, qui existaient à l’époque. La priorité était politique, même si on développait parallèlement la société de consommation, laquelle, du reste, allait s’avérer elle aussi un facteur de dissolution puissant des solidarités traditionnelles.
Ce renversement de priorités va avoir des conséquences énormes, par rapport à ce qu’était la primauté du cadre politique et de l’appartenance patriotique, ou par rapport aux appartenances de classes qui se logeaient dedans.
Tout cela se disloque, à une vitesse stupéfiante, un peu partout dans le monde. Là, en effet, on est entré dans l’histoire globale. Car le projet de révolution politique ne s’éteint pas seulement à Saint-Germain-des-Prés, mais aussi au Bureau politique du Parti communiste chinois et au Politburo de Moscou ! En quelques années, on a littéralement changé de monde.
Changement qui ne concerne pas que l’idéologie.
Pensez par exemple à l’émancipation féminine, qui avait certes ses lettres de noblesse anciennes, mais qui avançait plus que lentement : en quelques années, l’égalité hommes-femmes est devenue une évidence, du moins dans le principe.
Or l’enjeu de l’émancipation féminine, pour la question de la structuration collective et de l’idéologie, n’est pas mince. L’un des réceptacles des valeurs religieuses, telles qu’elles organisaient implicitement nos sociétés jusqu’à une date récente, c’était la famille. Cette famille-là s’est littéralement évaporée, en faisant des femmes des individus comme les autres, et en créant pour de bon, cette fois, la société des individus.
Dans la société des individus, il n’y a pas de familles au sens institutionnel, dictant leurs rôles aux partenaires. Ce qui n’empêche évidemment pas les gens de vivre en couple et d’élever des enfants, mais pas de la même façon.
Comment définiriez-vous les règles de cette idéologie nouvelle qui pénètre toutes les activités humaines ?
L’essence du néolibéralisme, c’est de mettre en œuvre jusqu’au bout un principe philosophique simple, très ancien dans ses racines, mais qui devient pour la première fois la règle ultime du fonctionnement collectif : il n’y a que des individus – des individus qui sont définis par leurs droits, sur le plan abstrait, juridique, et par leurs intérêts, sur le plan concret, économique. Le problème politique n’est plus dès lors que celui des moyens de faire coexister les droits des individus et de leur permettre de maximiser leurs intérêts
Cette idéologie ne paraît même pas nouvelle, on croit savoir depuis longtemps ce qu’elle raconte. Elle n’a rien de subversif à première vue. Et pourtant elle est chargée d’un potentiel radical. Sans en avoir l’air, elle prétend dire le dernier mot de l’histoire humaine, qui est supposée trouver là son aboutissement
Le présent livre sa vérité, qui est notre liberté.
Le passé relève d’un obscurantisme meurtrier, dont nous n’avons rien à faire.
Nous sommes passés pour de bon dans quelque chose qui ne se pense pas comme une fin de l’histoire mais comme un au-delà de l’histoire.
Nous sommes à la fois dans une époque post-politique – il demeure du politique, mais à l’état résiduel, et comme une nuisance – et post- historique parce que notre présent, qui croit avoir trouvé les repères de la vraie liberté, ne se pense plus du tout comme un accomplissement de l’histoire mais comme la bonne formule, enfin trouvée, des sociétés humaines.
Cette vision repose en dernier ressort sur une profonde méconnaissance de ce qu’est et de ce qui fait une société. C’est là qu’elle pose problème et que nous retrouvons le sens habituel du mot « idéologie » : aveuglement, illusion.
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- Auteur
- ShahRukhShah
- Date de création
- 18 septembre 2021 à 20:20:08
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