Vous êtes un Célestin.
Depuis des années et des années, vous essayez d’échapper à cet étau qui vous enserre. Vous changez de style vestimentaire, vous essayez d’avoir une vie sociale, vous empruntez volontairement des mimiques verbales pour devenir quelqu’un d’autre, mais rien n’y fait. Vous restez un Célestin, triste, solitaire, pitoyable. Vos efforts ne mènent à rien. Vous ne changez pas.
Parce qu’au fond, vous ne voulez pas vraiment changer.
Toutes les composantes de votre être, quoique vous les haïssiez, sont collées à votre chair. Elles la constituent. Vous êtes telle la personne qui voue une aversion profonde pour son prénom, mais qui jamais ne le change. Car il fait partie d’elle, tout comme vos pitoyables composantes font partie intégrante de vous. Sans relâche, les autres ainsi vous excluent. Il n’est pas dans leur nature de repousser, mais il l’est de détester toute différence. Vous êtes si similaire à eux, et pourtant…
Vous en venez alors à une grande interrogation. Remettrait-elle en question toute votre existence ? Elle est si simple, et pourtant, elle apporte une si grande souffrance mêlée d’incertitudes.
Êtes-vous différent des autres ?
Êtes-vous l’âme solitaire qui erre en ce monde de conformisme, ou n’êtes-vous qu’une personne interchangeable, niant votre appartenance à un groupe bien réel de congénères pour affirmer vos différences face à l’autre groupe qui vous méprise ?
Ce groupe auquel vous appartenez vraiment, ne serait-ce qu’une chimère que votre esprit occulte volontairement afin de vous apporter de la satisfaction à vous sentir torturé ?
Et cette chimère-ci, ne serait-elle pas qu’une autre chimère, dissimulée parmi le fouillis vide de votre esprit ?
Sans remords, vous enfonceriez-vous plus profondément dans une boucle qui est la vôtre ? Deviendrez-vous la forme matérielle de l’ombre que vous êtes ?
Sans pouvoir se repentir et devenir autre que vous, serait-ce mieux de devenir une version plus poussée de la morne créature que vous êtes ?
Existerait-il un simple mot, un mot venant des plus sombres et rouges bouches des plus ténébreuses sorcières qui vous hantent ?
Ce mot existe, vous le savez. Ce mot est enfoui au plus profond de votre pitoyable être. C’est quand il germe que vous devenez cette ombre, et c’est en grandissant vers la lumière blafarde de la lune que vous devenez la forme matérielle que vous désirez maintenant être.
Ce mot est simple. Ce mot est post ou cancer.
