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Napoléon et Rousseau

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Roederer (Oeuvres), ou ce dernier rapporte une conversation avec Bonaparte tenue le 13 janvier 1803 :
" Je lis tout ce qui paraît : mon secrétaire me le présente tous les matins avec une notice. Ce qui paraît est misérable : cela dégoûte. Quelle différence de tout ce qu'on écrit aujourd'hui, à Voltaire ! Plus je lis Voltaire, et plus je l'aime. C'est un homme toujours raisonnable; point charlatan, point fanatique... J'aime beaucoup même son histoire, quoiqu'on la critique. La Pucelle ne vaut rien à la jeunesse; mais elle égayé les gens mûrs. Voltaire est fait pour les gens mûrs. Jusqu'à seize ans je me serais battu pour Rousseau contre tous les amis de Voltaire. Aujourd'hui c'est le contraire. Je suis surtout dégoûté de Rousseau depuis que j'ai vu l'Orient. L'homme sauvage est un chien... La Nouvelle Héloïse est pourtant un ouvrage écrit avec bien de la chaleur. Ce sera éternellement le livre des jeunes gens. Je l'ai lu à neuf ans. Il m'a tourné la tête."

Petites explications de texte :

Gueniffey dans son (Bonaparte) écrit :
"Bonaparte faisait partie de l'immense cohorte de disciples de Rousseau, même si, très tôt, lui avaient échappé quelques doutes sur la réalité historique de l'état de nature décrit par Rousseau, sans que, pour autant il contestât le postulat d'un homme naturellement bon et corrompu par l'histoire, la société et les inégalités. C'est en cela que le séjour en Egypte fut décisif : l'Italie n'avait pas détruit sa foi en Rousseau ; l'Egypte l'en dégoûta : "je suis surtout dégoûté de Rousseau depuis que j'ai vu l'orient, dira-t-il ; l'homme sauvage est un chien." Dans les Arabes il ne vit pas, comme Volney, des victimes de l'histoire et de l'injustice, ou, comme Savary, de bons sauvages miraculeusement préservés des méfaits de la civilisation, mais le visage sans fard d'une humanité hideuse : "C'est le spectacle de l'homme sauvage le plus hideux qu'il soit possible de se figurer." Bonaparte, cette fois, avait choisi Voltaire contre Rousseau."

Bruno Colson "de la Guerre : Pour Steven Englund, Napoléon était plus un disciple de Hobbes que de Rousseau. Il avait une vision pessimiste des rapports humains : l'état de nature était celui d'une lutte permanante pour la domination. Il était incapable de faire la paix. Il faut dire que, dans les valeurs de l'époque, le triomphe sur le champ de bataille représentait le "nec plus ultra" de la gloire et de grandeur. Englund insiste à bon droit sur la nécessité de prendre en compte cet élément."

Tulard (Napoléon ou le mythe du sauveur) :
"A partir de cas concerts, il dégage une philosophie politique. Philosophie plus proche de Machiavel que de Rousseau, d'ailleurs renié dès le Consulat. A Eugène, devenu vice-roi d'Italie, il envoie le 7 juin 1805 ses recommandations :
"Montrez pour la nation que vous gouvernez une estime qu'il convient de manfester d'autant plus que vous découvrirez des motifs de l'estimer moins. Il viendra un temps où vous reconnaîtrez qu'il y a peu de différences entre un peuple et un autre."
On pourrait, à l'aide de ces conseils prodigués dans cette letrre, écrire un nouveau traité du Prince."

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Farglory66
Date de création
11 août 2021 à 10:03:04
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