Il est 2h du matin. Tu fixes le plafond. Dans ta tête défilent des scénarios, des images d'elle, parfois une idée salace croise ton esprit et tu te mets à bander. Aujourd'hui tu t'étais décidé à aller l'aborder. Tu avais décidé de mettre le stress de côté. Tu l'avais croisé l'après-midi, mais tu n'étais pas lavé, alors tu t'es contenté de la regarder, de la fixer. Il y a quelque chose d'assez neutre, blasé dans son regard. Tu te demandes si elle te tourne autour. Alors tu finis ta pause, tu rentres chez toi, et tu passes le reste du taff à penser à l'aborder. Evidemment, plus tu y penses, plus tu as les chocottes.
Tu te douches, tu te parfumes, tu te regardes dans la glace. Tu as passé une nuit de merde, dormi 2 heures la nuit précédente. Tu te dis que c'est pas une excuse. Mais nonobstant. Alors tu y vas, tu es frais, tu sens bon, vous vous regardez, tu crois décerner dans son regard une demande, une envie d'être prise. Mais pas maintenant. Il te faut du courage alors tu en commandes une, puis une autre. Un copain t'alpague, ou c'est toi qui l'alpagues. Tu es ailleurs pendant que vous parlez, tu penses à elle, tu penses à mille scénarios. Elle passe, repasse, et tu n'oses pas la croiser du regard. Tu sors passer un coup de fil, elle sort fumer, encore une occasion manquée. Tu sais que la fenêtre est en train de se refermer, qu'elle te pardonnera pas éternellement ta timidité. Et tu sais que t'as pas forcément à te définir selon son désir, mais ces regrets que tu sens déjà poindre, c'est pas par rapport à elle, c'est par rapport à toi. Il y a 5 ans, ca aurait été une obsession - car tu trouves que c'est une très belle femme. Mais tu as mûri, tu te protèges, tu es détaché, le je m'en foutisme comme réponse à l'angoisse.
Après celle la tu vas la voir. Tu lui dis n'importe quoi, tu lui demandes son nom, son numéro, n'importe quoi, il faut briser la glace avant que ça devienne trop gênant. Mais d'autres mecs lui parlent, la font rire. Tu guettes discrètement, tu te sens plus à la hauteur, inadéquat. Tu en rallumes une, puis une autre. Il faut y aller. Mais t'es tétanisé. Tu finis ta bière, tu la calcules pas, t'as pas envie qu'elle voit la peur et le stress dans ton regard, alors tu te dis que cette fois n'était pas la bonne, que tu l'aborderas une fois ou elle est seule, ou tu es en meilleure forme, enfin le bullshit classique que tu te racontes depuis des années. Tu rentres, tu es épuisé, déogûté, blasé, vidé de toute joie, tu te sens faible, de manquer un truc aussi simple, un truc que les autres mecs semblent avoir aucun mal à faire, alors tu te dis, "demain je vais la voir", tu t'effondres de sommeil à 21h, tu te réveilles à minuit, impossible de te rendormir, tu penses à elle, tu te dis "lâche l'affaire", mais t'as déjà trop lâché l'affaire, tu veux te libérer de cette boucle.
Il est 2h du matin. Tu fixes le plafond, etc.
