Toutes les nuits, il y a un homme qui déambule sur les routes près de chez moi

Il semble déambuler sur les routes désertes de la campagne, traversant parfois notre hameau, et faisant alors aboyer les chiens. Ce qui nous réveille. Les chiens n'aboient jamais la nuit, il n'y a pas de voleurs par ici, tout le monde se connait. Donc quand c'est le cas, on saute du lit pour jeter un œil dehors.

Il faut savoir qu'on est la dernière maison du hameau, c'est une ancienne grange réhabilitée un peu à l'écard, le premier voisin est à deux cent mètres. Ici, il n'y a pas de lampadaires. Seule la Lune éclaire la rue d'une pâle lumière.

La première fois que les chiens ont aboyé, c'était surprenant. Je me suis levé et ait regardé par la fenêtre. J'ai vu un homme qui marchait tranquillement avec une canne blanche. L'absence presque totale de lumière ne laissait pas distinguer les détails, mais il m'a semblé que cet homme était dépourvu de visage. Je ne pouvais distinguer ni ses yeux, ni son nez, ni sa bouche, alors que sa peau pâle reflétait pourtant la lumière de la Lune.

Je suis allé réveiller mon père, lui ait expliqué la situation, et nous sommes sortis, mais n'avons trouvé personne. Il n'avait pas entendu les aboiements, et ne croyait pas mon histoire qu'il jugeait surréaliste. Pour cause, elle l'était. Tellement que je me mis à douter moi-même de ce que j'avais vu cette nuit-là. Le cerveau nous joue parfois des tours... Je me suis rapidement résolu à considérer ça comme une sorte de rêve étrange.

Mais exactement neuf jours après, rebelote. Les chiens se sont mis à hurler en pleine nuit. Mon père s'est réveillé cette fois-ci et nous nous sommes précipités devant la maison avec nos lampes. C'est en éclairant la rue dans sa longueur qu'on a aperçu la silhouette dudit homme, au loin. Il s'éloignait et arrivait au virage qui marque la sortie du hameau.

On en revenait pas. La silhouette ne nous disait rien, et les quelques habitants du hameau ne sont vraiment pas du genre à faire des balades nocturnes, encore moins quand ça implique de faire aboyer les chiens. On a passé le reste de cette nuit à veiller.

Les jours suivants nous avons questionné nos voisins sur cette bizarrerie, mais personne n'avait vu ni entendu quoi que ce soit. L'un deux, en revanche, nous a rapporté avoir trouvé une gourmette près du pas de sa porte. Elle était au nom d'un certain Raymond Robinson. Or il n'y a jamais eu de famille Robinson dans les alentours.

Les chiens ne nous ont plus jamais réveillés ensuite.

Ça s'est passé l'an dernier. Je repensais à cette histoire ce soir. J'ai tapé pour la première fois ce nom de Raymond Robinson sur Google. Les résultats m'ont glacé le sang.

https://en.m.wikipedia.org/wiki/Raymond_Robinson_(Green_Man)

Raymond Robinson, dit Green Man ou Charlie No-Face, un homme au visage arraché suite à un accident qui aimait se promener sur les routes la nuit, s'aidant d'une canne blanche pour marcher. Tous les détails correspondent. Je suis sur et certain que c'était ce type. Je flippe ma race. Et j'ai pas de souci avec les marginaux, les originaux ou les handicapés. Le problème c'est qu'au moment des faits, Raymond Robinson était déjà mort depuis 35 ans.