Vous avez déjà tous entendu ce genre de phrase qui s'appuient sur des statistiques qui semblent prouver que plus les gens ont fait des études, plus ils votent à gauche. Même si elles sont commandées par des journaux de gauche, je pense qu'il y a un fond de vérité dedans.
Et cela prouve deux choses chez ces gens de gauche :
1) cela traduit un mépris de classe ABSOLU (ce qui est assez cocasse de la part des lutteurs de classe) : si vous votez à droite, c'est que vous n'êtes pas très intelligent, qu'on vous a bernés et si vous aviez fait des études, ça n'arriverait pas. Si tout le monde avait fait un master, tout le monde voterait communiste et irait s'enculer dans des lendemains qui chantent, c'est bien connu.
2) c'est un symptôme de ce que Sartre appelle "l'accrochage" de l'intellectuel : persuadé que le monde c'est de la merde, l'intellectuel s'accroche à des idéaux de gauche qui appellent de leurs vœux ces mêmes lendemains qui chantent. Le problème, et Sartre en fait lui-même le constat, c'est que cela pousse à une confusion mentale totale face au mal. Dès que dans une société de gauche il arrive un mal, c'est forcément une erreur humaine, ça ne peut pas venir du système mais toujours de l'humain. Il ne faut donc surtout pas remettre en cause le système. L'exemple typique là encore avec Sartre, c'est quand il est allé visiter l'URSS en 1954 et qu'il a proclamé haut et fort que c'était le pays où il y a le plus de liberté. Il commente ensuite "c'est vrai que j'en pensais du bien, mais c'est que je me défendais d'en penser du mal".
Finalement, donc, si on vote davantage à gauche quand on a fait de longues études, ce peut être pour ces deux raisons. Ou bien c'est par droitisme refoulé (1) : on se sent supérieur aux autres et pour compenser on vote pour l'égalité. Ou bien (2) c'est qu'on s'est rendu compte, mais presque inconsciemment, que penser par soi-même conduisait à refuser la logique des partis (le Parti, c'est celui qui pense à ta place). Sauf que par lâcheté ou par fainéantise intellectuelle, on ne va pas jusqu'au bout et on se dit que de deux maux, il vaut mieux choisir le moindre. Alors on vote à gauche en croyant que l'égalité entre ceux qui ne pensent pas vaut mieux que l'inégalité.
Notez bien que ces deux solutions sont parfois adoptées en même temps. Elles ne sont pas du tout exclusives. Et comme vous avez pas lu deux lignes de mon pavé, post ou cancer fdp.
