[ALERTE] Décès de Risitas !

Le 18 juillet 2021 à 21:15:57 :
Repose en paix Risitas

Le 18 juillet 2021 à 21:15:57 :
Repose en paix Risitas

Le 19 juillet 2021 à 08:35:25 :
Repose en paix Risitas

Le 19 juillet 2021 à 08:35:25 :
Repose en paix Risitas

Élégie à Risitas

https://www.youtube.com/watch?v=tUMc_-Bcunk

Qui aurait imaginé le destin de cet enfant de Séville né en 1956.

A une époque où internet n'existait pas, n'était même pas concevable dans la tête de cet enfant dévalant les rues de Séville en courant.

Avant même notre propre existence son rire résonnait entre les façades des rues étroites, porté par la fraîcheur de l'air dans l'ombre des mansardes, sous le soleil brûlant d'Espagne qui faisait cuire les tuiles rouges dans un ciel radieux.

Quels fils le destin a-t-il tissé pour nous rassembler ainsi les uns les autres ? Toutes ces vies aux quatre coins de l'Europe, un son enregistré dans un micro de studio, une image projetée sur les écrans. Tout défragmenté dans la toile internet telle la matière naissant dans la mort des étoiles, projetée dans l'espace des possibles jusqu'à ce que d'heureuses rencontres forment de nouvelles substances cosmiques, comiques.

Je revois l'Euro 2016 et sa tête affublée de perruques Françaises ou Belges. Encore a cette époque nous doutions : Quel est cet étrange délire ?

Puis sa voix, puis son rire, emportant les cœurs à l'arrachée, séduisant les plus endurcis, consolant les solitudes et les interminables soirées.

Le temps de se demander si le délire risitas se tasse, si le délire cétacé, et voilà maintenant les « risifics ».

Des centaines de kheys s’attellent à la tache. Jusque tard le soir, dans des chambres anonymes. La face obombrée dans l'éclat blafard des leds de l'écran, l'éclat jaune fauve d'une lampe de chevet offrant leur visage en demi-lune. Ils pianotent sur leur clavier, l'esprit en ébullition, piochant dans la moisson des stickers de notre idole et de ses acolytes. Des idées jaillissant du fond du génie humain. L'envie de partager, l'envie de rire, l'envie de vivre, déployés dans un éventail de topics tous plus poignants, saugrenus, tordus et tordants les uns que les autres.

Et du fond de la ruche a fiel, du taj mahal de la haine, du dernier rebut de forum actif d'internet à l'heure des autres réseaux sociaux, qui s’enivrent de gloire et de selfies dans la plus grande vacuité de l'esprit pour le paraître... Oui à cette heure disais-je, un forum d'anonymes résiste toujours et encore par la créativité indomptable et indomptée. Malgré le changement d'époque et le courroux de la censure, Risitas devint le porte étendard d'une jeunesse en mal de vivre dans un monde en pleine mutation. Face aux doutes et aux incertitudes de l'avenir, le rire de cet Espagnol soyeux est un cadeau qui se partage de main en main, de topic en topic, de stickers en stickers. Une bonne nouvelle qui se répand.

Personne ne sera jamais capable de mesurer toute la portée de la vie de cet homme à travers ce forum. Personne n'aurait pu imaginer une telle destinée, surtout pas lui, petit enfant de Séville né en 1956, et qui apprendra quelques années plus tard l'Espagnol en classes. Nos parents à nous ne s'étaient alors pas encore rencontrés.

Un formidable voyage dans le temps, une aventure humaine, comique et tragique, un morceau de diamant brut du cœur des Hommes. S'il fallait un jour envoyer un émissaire à une nouvelle race extra-terrestre pour présenter ce que sont les humains, voilà ce que je voudrais envoyer : Une vidéo de Risitas. Celle où il nous parle des paelleras, celle où il offre un jambon en bois à Jésus, celle où il raconte le déchargement de son camion de sacs de ciments...

« Je crois que ce sont les petites choses, les gestes quotidiens des gens ordinaires qui nous préservent du mal… de simples actes de bonté et d'amour. »

Maintenant il continue à vivre dans les cœurs, dans nos cœurs. Pour des années encore sur ce forum et jusqu'à notre mort. Qui sait. Peut-être que dans un futur lointain deux kheys à l'hiver de leur vie se rencontreront par hasard dans un hospice, et qu'un appareil multimédia leur permettra de revoir, dans une bouillie de pixel et un son grésillant, une archive numérique de Juan Joya Borja.