Rien n'a de valeur sur le long terme, mais je prends beaucoup de plaisir à court terme quand je domine les gens qui m'entourent en débat. La plupart des lambdas n'ont aucune expérience plus profonde que de la philosophie et politique de surface, alors lire un petit peu chaque jour a suffi pour me donner la réputation d'être intelligent et doué. Personne ne soupçonne que je ne suis en fait qu'un pseudo-intellectuel demi-habile.
Ainsi, je lis de la philosophie pour seulement deux raisons :
- pour faire croire aux lambdas que je suis intelligent
Il est d'ailleurs inutile de faire autrement, sauf si vous vous spécialisez en études de philosophie.
Quand j'attrape un de ces plébéiens en débat, très vite, je le mets dans les cordes. Il est sincère le petit prolétaire, il dit ce qu'il pense et croit pouvoir trouver des solutions ! Plus le bon bougre que je chope est naïf, plus mon plaisir sadique est décuplé. Très vite, et devant tout le monde, je commence par lui demander à quelle école de pensée il se rattache. Quand les premiers bégaiements retentissent, et qu'il me dit qu'il donne juste son opinion propre, il est déjà mort. Je mets le premier coup en démontant ses fondements. Rhétorique et épistémologie sont les bistouris que j'utilise lors de cette partie de l'autopsie. Comment sait-il ce qu'il prétend savoir ? Je cite Popper, Quine, et tous les saints noms. Je balance souvent Feyerabend en grand final, alors que je ne l'ai même pas lu. Mais qu'importe ? La plupart du temps, à ce stade, le gentil ignare a déjà le visage rougi, et essaie de tempérer la discussion. "Non mais moi, je dis juste que..." ; mais je ne le lâche pas. Quand, petit à petit, il voit le regard des gens autour, qui accordent de moins en moins de crédit à ses propos, changer, j'exhale et j'exulte.