Te souviens-tu, disait un capitaine
Au vétéran qui mendiait son pain,
Te souviens-tu qu'autrefois dans la plaine,
Tu détournas un sabre de mon sein ?
Sous les drapeaux d'une mère chérie,
Tous deux jadis nous avons combattu ;
Je m'en souviens, car je te dois la vie :
Mais, toi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu ?
(...)
Te souviens- tu qu'un jour notre patrie
Vivante encore descendit au cercueil,
Et que l'on vit, dans Lutèce flétrie,
Les étrangers marcher avec orgueil ?
Garde en ton cœur ce jour pour le maudire,
Garde en ton cœur ces voix qui se sont tues,
Qu'un chef jamais n'ait besoin de te dire :
Dis-moi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu ?
À chaque fois j'en ai des frissons...